Les prorusses revendiquent la victoire

Les autorités prorusses de quatre régions ukrainiennes ont revendiqué la victoire du "oui" en faveur d'une annexion par la Russie.

Une femme vote sur le rattachement à la Russie à Lougansk. © KEYSTONE/AP

Moscou a en outre brandi encore une fois la menace de l'arme nucléaire pour défendre ces territoires. Dans une vidéo postée sur Telegram, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré que l'Ukraine "agira pour défendre son peuple".

"Nous agirons pour protéger notre peuple: à la fois dans la région de Kherson, dans celle de Zaporijjia, dans le Donbass (et aussi) dans les zones actuellement occupées de la région de Kharkiv et en Crimée", a déclaré M. Zelensky dans sa première réaction après l'annonce des résultats par les autorités prorusses.

S'adressant, plus tôt mardi dans un message enregistré, au Conseil de sécurité de l'ONU, il avait affirmé que Kiev ne peut mener de pourparlers avec Moscou après l'organisation de ces "pseudo-référendums".

"Bienvenue à la maison"

"La reconnaissance par la Russie des 'pseudo-référendums' comme 'normaux', la mise en oeuvre du (même) scénario qu'en Crimée et une énième tentative d'annexer une partie du territoire ukrainien signifie que nous n'avons pas à discuter avec l'actuel président russe", a-t-il dit.

La commission électorale de la région de Zaporijjia a affirmé que 93,11% des électeurs avaient voté pour le rattachement à la Russie, après le dépouillement de 100% des bulletins de vote, tout en précisant qu'il s'agissait pour l'heure de résultats préliminaires.

Dans la région de Kherson, l'administration d'occupation pro-Moscou a indiqué que 87,05% des électeurs avaient voté en faveur du "oui", après le dépouillement de tous les bulletins. Peu après, celle de Lougansk a aussi annoncé la victoire du oui. Dans la soirée, les autorités prorusses de la région de Donetsk ont fait de même.

"Bienvenue à la maison, en Russie!", a rapidement réagi sur Telegram l'ancien président Dmitri Medvedev. "Nous nous réunissons avec notre grande patrie, avec la grande Russie", a réagi le chef de la République populaire de Donetsk, Denis Pouchiline.

"Jamais reconnaître" les résultats

Les alliés de l'Ukraine ont dénoncé ces scrutins, organisés dans l'urgence face à la progression des forces de Kiev. La secrétaire générale adjointe de l'ONU pour les Affaires politiques a répété mardi lors d'une réunion du Conseil de sécurité sur ces "référendums" d'annexion, le soutien des Nations unies à "l'intégrité territoriale de l'Ukraine" dans ses "frontières reconnues".

Le G7 a juré de ne "jamais reconnaître" les résultats et Washington a promis une réplique "sévère" par la voie des sanctions économiques. Par la voix de son ambassadeur à l'ONU, la Chine a appelé au respect de "l'intégrité territoriale de tous les pays".

"La Chine a pris note des dernières évolutions de la situation en Ukraine" et "notre position" est "claire et constante ; c'est-à-dire que la souveraineté et l'intégrité territoriale de tous les pays doivent être respectées", a déclaré Zhang Jun, alors que Pékin est accusé par les Occidentaux d'être trop conciliant avec la Russie.

Le président russe Vladimir Poutine a de son côté défendu ces scrutins comme le moyen de "sauver les populations" locales, Moscou justifiant son invasion en accusant Kiev de "nazisme" et d'orchestrer un "génocide" des russophones en Ukraine. Ces votes concernent plus de 20% de la surface de l'Ukraine.

"Paix et stabilité"

En Crimée, péninsule annexée en 2014 par la Russie, des bureaux de vote avaient été ouverts spécialement pour des réfugiés de la région de Donetsk, partiellement contrôlée par Moscou et ses alliés séparatistes.

"J'espère que la paix et la stabilité viendront pour les gens ordinaires, pour les travailleurs", a déclaré Rouslan Iouchkevitch, un mécanicien de 37 ans originaire de Marioupol, ville portuaire en grande partie détruite lors de féroces combats.

Revendiquant son emprise sur ces nouveaux territoires, Moscou a de nouveau menacé mardi de faire usage de l'arme nucléaire. "La Russie a le droit d'utiliser des armes nucléaires si nécessaire", a dit l'ancien président et numéro deux du Conseil de sécurité russe Dmitri Medvedev.

Une position confirmée par le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, qui a rappelé la doctrine militaire russe, qui prévoit la possibilité de telles frappes en cas d'attaque contre le territoire russe. Dans la soirée, le Pentagone a affirmé que Washington "prenait ces menaces au sérieux", sans toutefois "ajuster sa position nucléaire pour le moment".

Fuites sur Nord Stream

La Russie continue parallèlement de mener une mobilisation de ses réservistes afin de recruter 300'000 combattants pour son invasion de l'Ukraine, cherchant la parade à la contre-offensive des troupes ukrainiennes qui ont, fortes des livraisons d'armes occidentales, repris des milliers de kilomètres carrés de territoire début septembre.

En Crimée, une journaliste de l'AFP a vu des rangées d'hommes mobilisés, souvent d'âge mûr, en treillis militaire et kalachnikov en main, attendre leur tour avant de monter dans des bus.

Cette campagne de recrutement, menée par endroits de manière chaotique, a poussé de nombreux Russes à fuir, un exode confirmé mardi par deux pays voisins, la Géorgie et le Kazakhstan, tandis qu'un afflux est également observé aux frontières de la Mongolie et de la Finlande.

Par ailleurs, les gazoducs Nord Stream construits au fond de la mer Baltique pour acheminer le gaz russe vers l'Europe ont été touchés par des fuites majeures. Bien qu'ils soient hors service, les deux tubes étaient remplis de gaz.

Le Kremlin s'est dit "extrêmement préoccupé", disant n'exclure "aucune" hypothèse, y compris celle d'un sabotage. L'Ukraine a de son côté dénoncé "une attaque terroriste" russe.

Les vastes fuites en cours sont dues à des "actes délibérés" et "pas à un accident", a affirmé mardi soir la Première ministre danoise Mette Frederiksen, pour qui elles devraient durer "au moins une semaine" jusqu'à l'épuisement du méthane qui s'échappe des conduites sous-marines. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a elle aussi estimé qu'il s'agissait d'un "acte de sabotage".

ATS
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