Factures médicales: comment éviter de payer des surcoûts?

Savoir lire une facture médicale permet de mieux traquer les erreurs. La Fédération des patients de Suisse romande donne quelques conseils.

Chaque année, 100 millions de factures médicales sont émises en Suisse. © ATS KEYSTONE

Environ 5% des factures émises par les médecins, les hôpitaux ou les thérapeutes comportent des erreurs, selon les assureurs-maladie. C'est même plus selon la Fédération des patients de Suisse romande, qui estime plutôt qu'entre 10 et 15% des factures médicales sont incorrectes. Des erreurs involontaires dans la plupart, des abus plus rarement, mais dans tous les cas, elles peuvent entraîner des surcoûts.

Voilà pourquoi la Fédération de patients de Suisse-romande cherche à mieux former les Suisses, afin qu'ils connaissent leurs droits et puissent mieux contrôler les factures qu'ils reçoivent après un soin ou un traitement. Ce qui peut alléger le porte-monnaie. Jeudi dernier, une formation pratique a été donnée à l'Université de Fribourg. Voilà les conseils de Simon Zurich, vice-président de la Fédération des patients de Suisse romande.

          1) Savoir ce qui se passe pendant une consultation

Cela peut paraître basique. Mais parfois, le rendez-vous se passe rapidement, tout s'enchaîne, le patient peut aussi être stressé ou ne pas oser demander des explications. Il en a pourtant le droit. "Il est intéressant de poser des questions sur les examens que l'on nous fait passer: savoir en quoi ils consistent, à quoi ils servent, quel est leur nom précis", explique ainsi Simon Zurich. "Cela permet ensuite de vérifier si l'examen qui figure sur la facture est bien celui qui a été réalisé." D'autant que parfois les noms d'examens peuvent être très proches et prêter à confusion. 

Et c'est opportun, selon lui: "On a vu des cas où des services d'ophtalmologie ont facturé des examens qui n'avaient pas été fournis de manière systématique. On encourage donc tous les patients à être attentifs aux examens passés chez des spécialistes." Des informations utiles financièrement, mais pas que, souligne Simon Zurich: "Cela sert aussi à mieux connaître son corps et son état de santé."

          2) Noter le temps passé en consultation

Il s'écoule souvent plusieurs jours, voire plusieurs semaines entre un rendez-vous médical et la réception de la facture. Par conséquent, il peut être utile de noter le temps passé en consultation, afin de vérifier que la durée facturée correspond bien à la durée effective de la prise en charge. Là aussi, c'est tout bête, mais parfois cela permet de détecter une erreur.

C'est par exemple ce qui est arrivé à un parent qui avait téléphoné à un service de télémédecine pour demander s'il devait emmener son enfants aux urgences ou non, raconte Simon Zurich, vice-président de la Fédération des patients de Suisse romande: "Sur le décompte, la durée de la prise en charge était bien supérieure à l'appel téléphonique effectif. Cela a mis la puce à l'oreille du parent, qui a ensuite décelé d'autres erreurs de facturation et pu faire baisser la somme due de moitié."

          3) Contrôler la facture et guetter les surcoûts

Au moment de la réception de la facture, il est recommandé de vérifier les informations de base: outre celles sur la durée de la consultation ou le type d'examens réalisé, il est aussi utile de contrôler si l'identité du patient est la bonne et si la somme des frais est juste. Si tout est bon, vous pouvez alors passer à l'examen de détail, et vous assurer que tout surcoût est bien justifié.

Deux majorations, en particulier, devraient attirer votre attention:

          * la prestation médicale notée "en l'absence du patient", par période de cinq minutes: "Souvent, les patients reçoivent une facture pour "consultation du dossier médical en l'absence du patient". Mais en fait, cette durée de préparation, quand le patient n'est pas encore dans le cabinet, devrait être compris dans la consultation de base. Mais on a des médecins qui facturent les deux à double", explique Simon Zurich. Lui recommande aux personnes qui voient cette mention régulièrement apparaître sur leur facture de demander des explications à leur médecin, afin de comprendre pourquoi le professionnel a eu besoin d'autant de temps pour préparer cette consultation-là.

          * les majorations pour "dérangement en cas d'urgence": peu de patients le savent, mais il y a des règles, rappelle Simon Zurich: "Ces suppléments doivent être facturés uniquement si le médecin voit directement le patient ou la patiente. Si ce n'est pas le cas, s'il y a une période d'attente dans une salle d'attente ou de prise en charge par une assistante médicale, et cela même si le rendez-vous n'était pas prévu, même si c'est une consultation par téléphone, dès le moment où le patient doit attendre, dès le moment où le médecin ne vient pas immédiatement, alors là, cette indemnité forfaitaire pour un "dérangement en cas d'urgence" ne peut pas être facturée. Mais nous remarquons que c'est quelque chose qui est encore parfois facturé de façon injustifiée."

          4) Oser demander des explications

Enfin, une recommandation essentielle, d'après la Fédération suisse-romande des patients: demander des explications à l'émetteur de la facture, médecin ou hôpital, afin de mieux comprendre pourquoi c'est un tarif ou un autre qui a été appliqué. Si vous ne comprenez toujours pas, vous pouvez vous tourner vers votre assureur pour lui faire part de vos réserves. "Et si vous avez encore des interrogations, la Fédération des patients de Suisse-romande tient une permanence à Lausanne, souligne Simon Zurich, prêchant pour sa paroisse. Elle donne aussi des conseils par mail et par téléphone."

Et justement, face à la demande grandissante, la Fédération des patients de Suisse romande vient d'embaucher une nouvelle personne, spécialiste en assurances sociales. Car depuis 2017, les demandes liées à des factures médicales problématiques adressées à la Fédération des patients ont plus que doublé, selon l'organisation. Le plus souvent, les erreurs portent sur des petits montants. Mais parfois, cela peut permettre d'économiser des milliers de francs.

Comme pour cette femme, hospitalisée à cause du Covid, pendant la pandémie, explique Simon Zurich: "Une erreur de codage avait conduit à un surcoût de 4'000 francs!" Elle s'était rendu compte que quelque chose clochait parce qu'elle avait été hospitalisée en même temps que son mari, subi les mêmes examens et était sortie au même moment. "Sauf qu'au bout du compte, l'époux avait reçu une facture de 2'000 francs, l'épouse, de 6'000 francs." La facture a donc été réduite, mais il est bien possible que cette Suissesse, si elle avait été hospitalisée seule, n'aurait jamais détecté cette erreur, une erreur technique, impossible à déceler sans être spécialisé dans le domaine.

RadioFr. - Maëlle Robert
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