Fribourg défend la betterave sucrière

Le législatif a voté mardi un décret sur le dépôt d’une initiative cantonale à l’Assemblée fédérale. But: éviter la fin de la production.

Les autorités fribourgeoises, Conseil d'Etat et Grand Conseil, veulent éviter la fin de la production des betteraves sucrières en Suisse (archives). © KEYSTONE/LAURENT GILLIERON

Le décret a passé la rampe par 58 voix contre 32 et 3 abstentions. La motion urgente à son origine avait été déposée en septembre 2020, puis votée par 59 voix contre 35 et 5 abstentions le 15 octobre, au terme d'un débat très animé, comme souvent à propos des dossiers agricoles, avec une opposition droite-gauche.

Les députés Fritz Glauser (PLR) et Pierre-André Grandgirard (Centre), tous deux agriculteurs, sont à l'origine d'un texte cosigné par 51 de leurs collègues. Les co-motionnaires demandent d'abord l’autorisation temporaire de l’utilisation du produit "Gaucho", un néonicotinoïde servant à traiter les semences.

Jaunisse de la betterave

Le texte propose ensuite à la Confédération d'entreprendre les "démarches nécessaires afin de renforcer la recherche et le développement pour la lutte contre la jaunisse de la betterave et son vecteur de transmission, le puceron". Il s'agirait de trouver de nouvelles variétés de betteraves biologiquement résistantes.

Président de la commission ad hoc, Pierre-André Grandgirard a expliqué que la météo plus rigoureuse de l'hiver dernier avait tué les pucerons. "Les infections ont été retardées, mais le phénomène demeure", a dit le député. Le conseiller d'Etat Didier Castella, en charge de l'agriculture, a confirmé l'absence d'alternative crédible.

Le canton de Fribourg dénombre 300 producteurs. L'Etat leur a versé une aide de 4 francs par tonne pour 375'000 francs, à côté du soutien de la branche elle-même. La récolte de l'automne 2020 avait vu des pertes de 30 à 45%, a détaillé le député Grandgirard. Le vote a en outre été reporté à septembre pour encore observer la situation.

A contre-courant

Le député vert Bruno Marmier a une nouvelle fois dénoncé le décret. A ses yeux, Fribourg est "complétement à contre-courant". Le PS s'y est opposé aussi. Le Centre, le PLR et l'UDC ont apporté leur soutien au secteur, mettant en lumière le risque de disparition d'une filière sucrière employant 2000 personnes en Suisse.

Les pertes de rendement pour la reine des champs sont plus importantes en Suisse romande qu'ailleurs, a encore expliqué Pierre-André Grandgirard. Une autorisation temporaire du "Gaucho" est "la meilleure des moins bonnes solutions", avait lâché un intervenant lors du débat d'octobre dernier.

Dans le canton de Fribourg, la betterave sucrière est cultivée sur 1430 hectares environ, soit 14,3 kilomètres carrés. Elle constitue une culture importante pour la rotation et fournit 8% de la production suisse.

Autorisation d'urgence

En 2018, l’Union européenne (UE) a interdit les néonicotinoïdes pour l’enrobage des semences en plein champ. En Suisse, les insecticides ont aussi été interdits, en raison de leur lente dégradation dans le sol et de leur toxicité pour les abeilles.

Il n’existe actuellement aucun traitement alternatif ou insecticide d’efficacité équivalente. Récemment, plus de dix Etats de l'UE, dont la France, ont accordé une autorisation d’urgence, limitée dans le temps. La démarche vise également à sauver la filière.

ATS
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