Nicolas Darnauguilhem: "Manger, c'est un vrai choix"

Le chef étoilé de la Pinte des Mossettes se lance un nouveau défi culinaire du côté d'Estavannens. Rencontre avant le coup de feu.

Le chef d'origine genevoise s'est installé depuis plusieurs années en Gruyère avec sa famille. © Frapp

Avant la réouverture du restaurant Les Montagnards, l'effervescence des derniers détails se faisait ressentir dans l'ancienne bâtisse du village d'Estavannens jeudi après-midi. Entre l'installation de nouvelles lampes, le laquage de chaises trouvées quelques minutes plus tôt dans le grenier du chalet et bouillonnement en cuisine, le chef Nicolas Darnauguilhem nous a accordé une interview retraçant son amour pour la cuisine et sa vision de celle-ci. 

Frapp: D'où vous vient votre passion pour la cuisine?

Nicolas Darnauguilhem: Elle me vient du lien que j'ai tissé avec mes arrière-grands-mères, qui étaient d'excellentes cuisinières. La cuisine, c'est avant tout l'amour de la table, de la communion, de la fête, ce sont aspects que j'ai toujours chéris depuis ma plus tendre enfance. J'ai le sentiment d'avoir toujours eu envie de faire de la cuisine. 

Quelle est votre vision de la gastronomie? 

Ma vision est assez large puisque c'est un terrain très vague dans le sens où ça peut aller de la haute gastronomie jusqu'à la street-food. Je dirais que pour moi, la gastronomie, c'est simplement l'art d'accueillir, de faire à manger, de faire en sorte que les gens passent un moment inoubliable, que ce soit dans un bistrot le temps d'un apéritif ou lors d'un repas de 5h sous un arbre en montagne. La gastronomie, c'est une affaire d'humains, ce sont des gens, des producteurs...et c'est ça qui est beau.

Vous parlez souvent de "gastronomie vivante". Qu'est-ce que ça veut dire pour vous? 

Quand on parle de la cuisine, on est forcément rattaché au vivant. On travaille avec des matières qui sont dans des cycles de vie très longs comme les produits carnés, les animaux. Il faut les considérer dès leur naissance et pendant toute leur vie jusqu'à la mise à mort, il faut être conscient de la manière dont on va approcher ça. Il faut beaucoup de respect, de regard et de conscience avec ce type de vie. J'applique la même chose sur le monde végétal. Avoir conscience de ce que l'on prélève dans nos jardins ou nos forêts, ça fait également partie du processus. Si on cuisine sans avoir conscience du vivant, j'ai l'impression que l'on passe à côté de quelque chose. Si on respecte le vivant, il nous le rendra et on se sentira bien plus vivant après avoir mangé. 

Vous avez reçu en 2022 une étoile verte au Guide Michelin, qu'est-ce que ça représente pour vous? 

C'est une très belle reconnaissance de la part du Guide Michelin. C'est une étoile assez nouvelle qui salue un engagement envers notre environnement, mais aussi la manière dont on considère nos collaborateurs. Ce n'est pas une distinction après laquelle j'ai particulièrement couru, cela fait des années que j'aurais pu la recevoir puisque mes valeurs sont restées inchangées depuis le début de ma carrière. Pour moi, manger c'est un vrai choix. En choisissant la manière dont on se nourrit, on choisit le paysage, l'environnement dans lequel on va vivre. Ces étoiles vertes saluent de vrais et grands efforts et poussent les restaurateurs à se questionner sur des éléments essentiels à la gastronomie. 

Frapp - Laura Kolly
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