Actions des agriculteurs français en colère
Le premier ministre Gabriel Attal est attendu avec de premières mesures vendredi, après une semaine d'un mouvement de colère des agriculteurs qui devient de plus en plus radical contre les symboles de l'Etat et les grandes surfaces.
Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, a demandé, entre autres, le versement d'aides de la Politique agricole commune dues depuis octobre, ou encore d'indemnisations liées à la grippe aviaire, et prévenu que le mouvement s'amplifierait si les agriculteurs jugeaient les annonces gouvernementales insuffisantes.
Selon le premier syndicat agricole de France, qui a estimé à 55'000 le nombre de manifestants jeudi, le déplacement du premier ministre aura lieu vendredi après-midi en Haute-Garonne, dans la région où le mouvement a commencé, mais Matignon n'a pas confirmé le lieu.
Le temps presse d'autant plus pour le gouvernement que les "syndicats risquent d'être débordés si l'attente est trop longue", ont alerté les services de renseignement dans une note consultée par l'AFP, soulignant que "les risques de troubles à l'ordre public sont réels".
Feux et fumier
A Bordeaux, des agriculteurs ont allumé des feux de paille et de palettes devant la préfecture et le conseil départemental. Du fumier a aussi été déversé devant l'hôtel de région, où quelques agriculteurs ont fait mine d'essayer de pénétrer avant de rapidement faire machine arrière.
A Agen, des agriculteurs ont bloqué la gare, après avoir multiplié les actions contre la grande distribution dans la matinée. Un sanglier a été pendu devant un bâtiment de l'Inspection du travail.
Présent jeudi soir sur un point de barrage de l'Isle-Jourdain, le député Renaissance Jean-René Cazeneuve a été enfariné par un agriculteur après des échanges assez houleux.
Près de Béziers, des viticulteurs ont forcé jeudi matin les portails de deux entrepôts de la grande distribution, après avoir incendié des palettes dans la cour d'un grand négociant de vin. "Maintenant c'est du pain ou ça sera du plomb", proclamait une pancarte dans le cortège.
Sans intervention des forces de l'ordre, sur instruction gouvernementale.
"Est-ce que les agriculteurs s'en prennent aux policiers et aux gendarmes? Est-ce qu'ils mettent le feu aux bâtiments publics? Ce n'est pas le cas", s'est défendu Gérald Darmanin sur TF1. "Je suis habitué aux coups de sang de ceux qui souffrent et qui ne gagnent pas beaucoup d'argent".
Les agriculteurs ont organisé 77 points de blocage jeudi un peu partout en France, selon un décompte du syndicat majoritaire FNSEA.
Prochaine étape, la région parisienne?
Les sections d'Ile-de-France de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs (JA) ont appelé leurs adhérents à se rassembler vendredi "sur les grands axes autour de la capitale".
Mais les agriculteurs indiquent qu'ils se rapprocheront de Paris, sans forcément y rentrer, si les annonces de Gabriel Attal sont jugées insuffisantes.
Camions étrangers vidés
"L'objectif pour ce soir c'est de bloquer" à Amblainville, à environ 60 kilomètres de Paris, a indiqué à l'AFP Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA, en affirmant être dans un convoi de "150-200 personnes, une quarantaine de tracteurs". "Après on verra."
Les agriculteurs en colère "ont raison de monter jusqu'à Paris" tant qu'ils n'ont pas de réponses, a estimé jeudi le secrétaire national du Parti communiste Fabien Roussel.
La FNSEA et les JA ont présenté mercredi soir au premier ministre une liste de 140 revendications, allant du versement immédiat d'aides dues à l'allègement de contraintes environnementales.
Symptôme du rejet des paysans français vis-à-vis d'une concurrence étrangère qu'ils jugent souvent déloyale, des manifestants ont arrêté et vidé "des camions étrangers, la plupart espagnols, marocains ou bulgares" sur la N7 à hauteur de Montélimar, a indiqué à l'AFP Sandrine Roussin, présidente du syndicat FDSEA de la Drôme.
La gauche, comme les ONG écologistes, estime que la solution n'est pas de revenir sur les contraintes environnementales, mais de lutter contre les importations alimentaires de pays utilisant plus de pesticides ou ayant des normes moins contraignantes, en refusant des traités de libre-échange.