Avortement en Suisse: on en est où?

La révocation du droit à l'avortement aux Etats-Unis provoque de vives réactions. L'occasion de se pencher sur la situation en Suisse.

Le droit d'avorter n'est plus garanti sur l'ensemble du territoire des Etats-Unis. Les Etats choisiront leur législation. © KEYSTONE

Il est là, entre l’homicide par négligence et les lésions corporelles graves. L'article 119 du Code pénal stipule que l’interruption volontaire de grossesse (IVG) n’est pas punissable si elle a lieu dans les 12 premières semaines de la grossesse, "si un avis médical démontre qu’elle est nécessaire pour écarter le danger d’une atteinte grave à l’intégrité physique" ou si la femme enceinte fait valoir un état de détresse.

Cette réglementation, aussi appelée "régime du délai", a été largement acceptée par la population le 2 juin 2002. Elle est entrée en vigueur le 1er octobre de la même année.

Pour ses partisans, c’était l’aboutissement de plusieurs décennies de débats houleux, où deux camps a priori irréconciliables ont pris part aux discussions. Leur spécificité? Elles ont mobilisé toutes les couches de la population: femmes, hommes, juristes, médecins, autorités politiques, citoyens. Une première tentative de décriminalisation avant 12 semaines de grossesse avait échoué, de très peu, dans les urnes en 1977. Le deuxième assaut fut le bon.

Aujourd’hui encore, le sujet divise. Aux Etats-Unis, la révocation du droit constitutionnel à l'avortement révolte des millions de personnes et interroge sur l’avenir. Le collectif Grève féministe organise ce mardi dans plusieurs villes, dont Fribourg, un rassemblement solidaire.

Côté politique, la question de la dépénalisation au sens strict est sur la table. Le 2 juin dernier, pour marquer le jubilé du régime du délai, Santé sexuelle Suisse a lancé une charte réclamant la suppression de l'avortement du Code pénal. La présidente de la faîtière Léonore Porchet a déposé une initiative parlementaire en ce sens. L’avortement doit être une affaire de santé, souligne la conseillère nationale verte, qui dénonce une stigmatisation morale des femmes souhaitant avorter, malgré les acquis.

De l’autre côté du Parlement, l’UDC a lancé deux initiatives populaires en phase de récolte de signatures pour restreindre l’accès à l’avortement. La première, lancée par la Bernoise Andrea Geissbühler, veut introduire un délai de réflexion d'un jour avant toute IVG. La seconde, celle d'Yvette Estermann, s'oppose aux avortements tardifs.

Rappelez-vous, le parti agrarien s'était emparé de la question il y a quelques années.  L'accueil de la population fut froid. Son initiative "financer l'avortement est une affaire privée" avait été largement rejetée, à 69.8%.

En Suisse, le taux d'interruptions de grossesse est bas en comparaison internationale. En 2020, un peu plus de 11'000 femmes y ont eu recours dans le pays, la vaste majorité (95%) pendant les 12 premières semaines de grossesse. Les raisons sont médicales pour le 5% restant. L'IVG coûte entre 500 à 3000 francs, elle est prise en charge par l'assurance maladie de base.

Frapp - Alexia Nichele
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