George Floyd "a supplié" jusqu'à la mort

La mort du Noir George Floyd à Minneapolis sous le genou du policier blanc Derek Chauvin était "un meurtre" et non pas une arrestation ayant mal tourné, a affirmé lundi le procureur dans son réquisitoire. Les membres du jury se sont retirés pour délibérer à huis clos.

La mort de George Floyd a suscité des manifestations antiracistes d'une ampleur historique et une vague d'indignation mondiale contre les brutalités policières (archives). © KEYSTONE/EPA/CRAIG LASSIG

"C'était un meurtre ! L'accusé est coupable des trois chefs d'accusation et il n'y a aucune excuse", a asséné le procureur en conclusion de son réquisitoire, qui a duré plus d'une heure et demie. L'ex-agent de la police de Minneapolis, âgé de 45 ans, est jugé pour meurtre, homicide involontaire et violences volontaires ayant entraîné la mort de George Floyd, qu'il avait interpellé avec trois autres agents pour une infraction mineure.

Pendant plus de neuf minutes, il avait maintenu son genou sur le cou du quadragénaire, qui était allongé sur le ventre, les mains menottées dans le dos. Son agonie, filmée en direct par des passants, a suscité des manifestations antiracistes d'une ampleur historique et une vague d'indignation mondiale contre les violences policières.

Situation stressante

"George Floyd a supplié jusqu'à ce qu'il ne puisse plus parler", a dit le procureur au jury. "Il fallait juste un peu de compassion et personne n'en a montré ce jour-là", a-t-il ajouté. "Il a appelé à l'aide dans son dernier souffle, mais l'agent ne l'a pas aidé. L'accusé est resté sur lui", a-t-il rappelé.

"L'accusé n'est pas jugé parce qu'il est policier", mais "il est jugé pour ce qu'il a fait", a souligné le procureur, estimant que Derek Chauvin avait "trahi son insigne".

Mais pour son avocat, l'ex-agent a agi de manière "raisonnable" lors de l'arrestation du quadragénaire à l'imposant gabarit, le 25 mai 2020 à Minneapolis. L'accusation a échoué à apporter la preuve du contraire "au-delà du doute raisonnable et M. Chauvin doit, par conséquent, être déclaré non coupable", a-t-il conclu après près de trois heures de plaidoirie.

Il a demandé aux jurés de ne pas juger "ce que l'agent aurait dû faire ou faire différemment dans ces circonstances, mais quels étaient les faits connus du policier au moment où il a utilisé la force" pour maîtriser un suspect agité qui se débattait.

Une conjonction de problèmes

Selon lui, George Floyd est décédé de la conjonction de problèmes cardiaques et de consommation de drogues - du fentanyl, un opiacé, et de la méthamphétamine, un stimulant - "dans le contexte" d'une immobilisation par la police, mais que celle-ci n'a pas provoqué son décès.

"Les policiers sont des êtres humains et ils peuvent faire des erreurs dans des situations très stressantes", a-t-il admis, suggérant que "la frustration" des passants qui pouvaient représenter une menace avait détourné son attention du sort de George Floyd.

L'ex-policier, en costume clair et chemise bleue, a suivi la plaidoirie sans porter de masque, semblant concentré sans manifester d'émotion. Il a refusé de témoigner, faisant usage du droit de tout accusé aux Etats-Unis de ne pas apporter de témoignage susceptible de l'incriminer. L'ex-policier encourt jusqu'à 40 ans de prison.

Fortes tensions à Minneapolis

Les condamnations de policiers pour meurtre sont très rares, les jurés ayant tendance à leur octroyer le bénéfice du doute. Si le jury ne parvient pas à se mettre d'accord sur l'ensemble des charges, le procès sera déclaré "nul".

Tout autre scénario qu'une condamnation inquiète les autorités locales. Le procès se tient dans un climat de fortes tensions et de manifestations quotidiennes après la mort récente d'un jeune homme noir en périphérie de Minneapolis. L'homme de 20 ans a été tué par une policière blanche lors d'un banal contrôle routier dans la banlieue de cette grande ville du nord des Etats-Unis.

Minneapolis s'était déjà embrasée après la mort de George Floyd en mai 2020. Les commerces se sont de nouveau barricadés derrière des planches en bois et la garde nationale patrouille dans les rues.

L'issue du procès aura aussi un impact sur celui des trois autres agents présents pendant la mort de George Floyd, qui doivent être jugés en août pour "complicité de meurtre".

ATS
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