Il ne suffit pas d'aimer les animaux pour être vétérinaire

Sur la centaine d'étudiants qui obtiennent leur diplôme de médecine vétérinaire chaque année en Suisse, seulement 60% la pratiquent.

Une pénurie de vétérinaires menace la Suisse. Certaines régions sont davantage touchées. Le canton de Fribourg connaît, lui, une situation de flux tendu. © pexels

Horaires difficiles, charge émotionnelle importante, gardes le week-end: il n’est pas tous les jours facile d’être dans la blouse blanche d’un vétérinaire. Les difficultés du métier poussent certains diplômés à se réorienter dès la fin de leurs études.

Sur 100 à 120 jeunes vétérinaires qui sortent des Universités de Berne et Zurich chaque année, les seules à former des vétérinaires en Suisse, seuls 60% pratiquent la médecine vétérinaire. Les autres vont se rediriger vers l’industrie pharmaceutique ou les services vétérinaires cantonaux par exemple.

Parmi les vétérinaires qui continuent à exercer, nombreux sont ceux qui raccrochent après deux à trois ans d’activités. "Etaient-ils mal préparés aux conditions réelles de la pratique? Est-ce qu’ils ne se rendaient pas compte?" s’interroge Valérie Grangier, présidente de la société des vétérinaires fribourgeois.

Conditions de travail plus attractives

Pour les garder dans le métier, la société des vétérinaires suisses (SVS) évoque la possibilité de mettre en place un système de mentorat avec des vétérinaires plus expérimentés qui coacheraient les plus jeunes. Les patrons des cabinets vétérinaires doivent aussi octroyer des conditions de travail attractives. "Il y a un changement générationnel, on ne travaille plus comme à l’époque", analyse Valérie Grangier, qui est salariée d’un cabinet mixte à Esmont, dans la Glâne. "Avant, c’était le vétérinaire tout seul qui donnait sa vie pour son cabinet. Maintenant, la jeune génération veut avoir des loisirs, des enfants et concilier vie privée et vie professionnelle."

Pour lutter contre la pénurie de vétérinaires qui menace la Suisse, la SVS est à l’origine d’une interpellation du Conseil fédéral par le conseiller national Lars Guggisberg (UDC/BE). L’élu demande au gouvernement de se positionner sur plusieurs propositions comme augmenter le nombre de places disponibles pour la formation, aujourd’hui limité par un numérus clausus, ou créer une troisième faculté vétérinaire du côté francophone. Car étudier en allemand, c’est n’est pas une mince affaire quand on est romand et cela peut même en décourager certains de se lancer dans ce cursus.

Une femme à la présidence

Valérie Grangier a été élue présidente de la société des vétérinaires fribourgeois (SVF) en mai 2022. Une année plus tard, elle demeure fière de sa nomination, même si elle était seule candidate pour le poste. Elle incarne aussi le renouveau puisqu’elle est la première femme à présider la SVF en presque 170 ans d’existence de la section cantonale.

La trentenaire est consciente des défis qui attendent sa profession, mais aussi des difficultés vécues par ses pairs. Elle-même a eu besoin de faire une pause: "il y a environ trois ans, j’en avais un peu ras-le-bol et j’ai travaillé en tant que factrice pendant une année. Mais au bout d’un moment, le métier m’a manqué et j’y suis revenue." Un temps d’arrêt nécessaire pour elle.

D’autres vétérinaires vivent également des situations de vie difficiles. Pour les soutenir, la SVS a lancé dernièrement une ligne téléphonique d’urgence. La hotline SOSforVets est gratuite et atteignable 24h/24, 365 jours par an au 0800 073 535. Cette offre supplémentaire répond à un manque, selon Valérie Grangier. "Le taux de suicide des vétérinaires est plus élevé que dans d’autres professions. C’est une donnée connue depuis plusieurs années. Dans d’autres pays, il existe des associations d’entraide pour les vétérinaires. C’est bien que l’on ait aussi quelque chose en Suisse désormais."

RadioFr. - Delphine Bulliard
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