"Il s'agit de changer une culture"

Les révélations sur les abus sexuels bousculent l'Eglise catholique. Interview avec Mari Carmen Avila, représentante de l'évêque pour la prévention.

Mari Carmen Avila est représentante de l’évêque pour la prévention depuis novembre 2022. © Diocèse Lausanne Genève et Fribourg

Comment réagissez-vous à l'étude de l'Université de Zurich ?

Je salue l'initiative. Elle a été menée sérieusement et de manière indépendante. J'espère qu'on va pouvoir aller de l'avant. Il faut encore étudier ce rapport et réfléchir aux démarches de formation des prêtres. Aujourd'hui, nous avons des pistes grâce aussi aux échos qui proviennent d'autres pays.

Quelle est la racine du problème?

Le phénomène abus est plus complexe que ce qu'on croit. Si on parle de système, on parle de plusieurs aspects relatifs à construire des abus. La conception du pouvoir dans l'Eglise joue un rôle énorme. Derrière ça, il y a la conception divinisée du prêtre. A la racine des abus sexuels, il y a un désir de pouvoir plutôt qu'une pulsion. Pas pour tous, mais une partie. Les prêtres se voient imposés une sorte de vocation divine, ils ne se rendent pas compte qu'ils restent humains. Il y a quelque chose à creuser du côté théologique.

Il s'agit donc de déconstruire cette image sacrée de l'homme de foi...

Ca va dans plusieurs sens. Le cléricalisme se manifeste aussi parmi les laïcs. Ces derniers ont une conception divinisée du prêtre, qui n'est pas correcte.

Comment former les prêtres, alors?

On envisage de mettre en ligne une formation pour les agents pastoraux cléricaux et laïcs, qui aborderait le phénomène des abus. Il s'agit de changer une culture. Tant qu'on n'aura pas une compréhension des faits, il y aura toujours un terrain propice aux abus.

Comment réagissez-vous face à un prêtre qui semble problématique?

Je suis souvent amenée à donner mon opinion sur les nominations. Je n'ai pas peur de parler avec un prêtre qui dysfonctionne, pour essayer de l'aider. Ceux qui tombent dans l'abus souffrent d'une grande solitude, et passent à l'acte après un long moment. Je crois, aussi, que le fait d'être une femme permet de leur montrer une vision différente des choses.

RadioFr. - Frédérique Antonin
...