Pierre de Maere: "Je me suis jeté dans la gueule du loup"
Le chanteur belge est aux Francomanias ce jeudi. Il nous raconte comment sa vie a été bouleversée par le succès de son premier album.
Radio Fribourg: Pierre de Maere, tu as été propulsé sur les scènes européennes, notamment grâce à ton titre "Un jour, je marierai un ange". Ici aux Francomanias, tu fais le dernier concert de ton long marathon de deux ans. Comment est-ce que tu te sens?
Pierre de Maere: Je vais très bien. Oui, c'est la fin, je suis ému, mais aussi ravi, parce que j'ai envie de faire de la musique, de sortir un deuxième disque et aussi de prendre des vacances.
Pierre de Maere, l'artiste, mais aussi le style: ton apparence est très importante pour toi. Est-ce que c'est lié à cette passion que tu as eue pendant quelques années pour la photographie?
Tu as raison, je me suis pris de passion quand j'avais 14 ans pour la photographie. J'ai eu un réflexe dans les mains, qui était celui d'un cousin, durant une sortie de famille et j'ai fait des photos de tous mes cousins et de ma sœur. Et je suis tombé amoureux de la photographie, comme ça, du viseur, du clic, de l'objet. J'ai économisé longtemps pour m'acheter un reflex, puis j'ai commencé à faire des photos de mes copines, de ma sœur toujours, et de mannequins, d'acteurs et d'actrices qui m'inspiraient. J'ai pensé en faire ma vie, à tel point que j'ai commencé des études de beaux-arts en photographie, mais le Covid a tout bouleversé. Je suis rentré chez mes parents. Je m'ennuyais, alors j'ai refait de la musique pour la première fois depuis longtemps.
Tu es parti de rien. Pas de cours de chant, pas de solfège. C'est osé de se lancer dans la musique comme ça?
C'était un pari. Je me suis jeté dans la gueule du loup. Je me souviens de mes premiers concerts, pendant lesquels je chantais faux, du début à la fin. Je me souviens de mes déplacements hyper maladroits sur scène. Je me souviens de moi qui essayais de jouer du piano.
Finalement, tu as fait le bon choix de te lancer dans la musique. Il y a eu ce premier EP "Un jour, je marierai un ange", sorti en 2022. Le 27 janvier 2023 ton premier album "Regarde-moi" sort, et deux semaines après, tu reçois le prix de la révélation masculine de l'année lors de la 38ᵉ cérémonie des Victoires de la Musique. Ça met en confiance de recevoir une telle distinction deux semaines après la sortie de son premier album?
Ça m'a carrément donné confiance… et en même temps non, parce qu'en face de moi, il y avait Tiakola, un rappeur bien connu qui vend tellement plus que moi. Quand j'ai gagné cette victoire, je ne me suis pas senti légitime. Mais le fait d'avoir l'aval des professionnels de l'industrie musicale, qui sont des programmateurs de festivals, de radio, de télévision, je me suis dit qu'il était temps d'arrêter de se prendre pour une sorte d'imposture. J'ai ma place dans le paysage francophone, et j'ai l'intention de le confirmer avec un deuxième disque. Pour moi, tout est encore très fragile, tant qu'il n'y a pas la confirmation du deuxième album.
Et ce premier album justement, "Regarde-moi", il s'adresse à ton public, qui doit te voir toi et ta beauté intérieure.
C'est le nom de l'album et d'un titre que j'aime beaucoup parce qu'il me raconte assez bien. C'est rare que mes morceaux parlent de moi. Souvent, je raconte des histoires qui ne sont pas les miennes, j'endosse des rôles. Mais celui-ci, c'est mon histoire, celle d'un artiste qui foule pour la première fois de sa vie les planches d'une scène et qui se doit de convaincre, de séduire juste un regard, qui serait attendri, qui serait ému, en admiration. En fait, on a besoin de ça pour se sentir bien, parce que c'est un exercice terrifiant de chanter devant du monde.
Et il y a aussi un lien avec Lady Gaga?
Je lui rends hommage avec un passage qui dit: ce soir, je strip et je tease. Dans une interview, elle raconte que quand elle s'est mise à chanter à New York, personne ne la regardait vraiment. Elle en a eu marre, alors elle a un jour décidé de se mettre nue et ça a fonctionné. Je trouve cette attitude formidable.
Et toi aussi, tu te mets nu quand tu enregistres un album?
C'est une épreuve d'enregistrer un album, parce qu'on a fantasmé des maquettes pendant six mois, des morceaux que j'adore, mais qui n'existent pas encore véritablement. La production est là, mais pas la prise de voix, je ne les enregistre pas. En arrivant au studio, je dois rendre honneur à ces chansons que j'imagine. C'est stressant, tout devient réel. Et en effet, je me fous à poil (rires). C'est aussi pour une raison très simple: je transpire énormément de stress, et je n'ai pas envie de souiller mes belles chemises.
Et donc il y aura un deuxième album, c'est ça? Tu as profité de la route pour recomposer des chansons?
Je l'espère pour 2026, si tout va bien. Je n'ai pas eu beaucoup de temps pour faire le premier disque et j'étais un peu frustré, même si je l'aime bien et je l'assume pleinement. Mais j'ai fait 14 maquettes pour garder 12 titres, ce qui n'est pas beaucoup. Donc là, j'ai déjà fait 25 maquettes et je vais encore en faire 30 et garder à nouveau 12 ou 13 titres. J'ai envie d'avoir de la marge et choisir ce qui est vraiment mieux.
Pierre, je termine toujours ces interviews avec un petit instant crush. Grosses tournées de salles et de festivals... ton crush, il est pour le public belge, suisse ou français?
Je vais être tout à fait honnête. Je me souviens d'une date où le public suisse a été extraordinaire. C'était aux Docks à Lausanne. Mais cet été, vous n'avez pas été les plus impressionnants (rires). J'aime évidemment le public belge, c'est toujours fabuleux.
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