La délinquance juvénile en hausse dans le canton de Fribourg

Le Tribunal des mineurs a enregistré 1850 nouvelles affaire l'an dernier, soit 214 de plus qu'en 2021.

La justice des mineurs du canton de Fribourg note une augmentation importante des affaires de pornographie (image d'illustration). © KEYSTONE

Après une baisse considérable du nombre de dossiers en 2020 (1427) liée notamment aux restrictions dues au covid, la justice des moins de 18 ans observe que la hausse des nouvelles affaires est constante depuis. En 2022, la Tribunal des mineurs du canton de Fribourg a dénombré 1850 nouvelles affaires, contre 1636 un an plus tôt.

Parmi les infractions en nette augmentation se trouvent celles qui concernent la pornographie avec 38 infractions enregistrées l'année passée, contre 16 en 2021. L'accès de plus en plus jeune aux outils numériques explique en partie ce bond. "Pour nous, c'est une grosse problématique. Si ces affaires nous arrivent, c'est qu'il y a eu un manque au niveau de la prévention", estime Pierre-Laurent Dougoud, juge des mineurs. Il évoque le rôle essentiel des parents. 

Les infractions les plus nombreuses en 2022 ont concerné la loi sur les stupéfiants, avec 410 affaires. Suivent les affaires de dommages à la propriété et les infractions à la circulation routière. Les garçons commettent la majorité des infractions (1455). Un quart des dossiers traités par la justice des mineurs concerne des filles (395), une proportion stable au fil des années. "Les filles qui sont dans un état de souffrance, qui sont déscolarisées ou qui ne trouvent pas de chemin professionnel, se retournent contre elles-mêmes et beaucoup moins vite contre la société", explique Sandrine Boillat Zaugg, juge des mineurs. "Mais quand les filles passent à l’acte, il n’y a presque pas de différence avec les garçons."

Ce sont les dossiers ayant trait aux stupéfiants (410) qui ont été les plus nombreux l'an dernier alors que les agressions, les voies de fait, les incendies intentionnels, la pornographie et les lésions corporelles simples sont les infractions qui connaissent une hausse marquée. En 2022, 426 jeunes de moins de 15 ans ont commis des infractions, soit un tiers de plus qu’en 2021 (321). Pour Pierre-Laurent Dougoud, cette augmentation pourrait s’expliquer en partie par le désœuvrement de certains mineurs notamment suite au covid. Certains jeunes ont abandonné leurs activités sportives ou leurs loisirs. Il y a donc un risque de tomber dans la délinquance s’ils n’ont pas d’autres occupations claires et légales, avance le magistrat.

En tout, 1'189 mineurs ont eu affaire à la justice fribourgeoise l'an dernier, soit une centaine de plus qu'en 2021 (1083). Un chiffre qui ne représente que 2% de l'ensemble des moins de 18 ans du canton de Fribourg. Une bonne nouvelle que relativise toutefois Pierre-Laurent Dougoud, juge des mineurs. "Sur ces deux pourcents se trouvent quelques dizaines d’individus qui s’ancrent dans la délinquance". Fribourg compte une cinquantaine de délinquants multirécidivistes.

Les outils à disposition de la justice des mineurs sont nombreux mais pas toujours facile à mettre en œuvre. Outre les peines comme les amendes, les prestations personnelles (travail d’intérêt général) ou la prison, plusieurs mesures existent comme la surveillance, l’assistance personnelle, les traitements ambulatoires ou encore les placements dans différents établissements.

Les placements en structure fermée ne sont pas aisés en raison du manque de places en Suisse romande puisqu’un seul établissement, situé en Valais, peut accueillir des garçons. La liste d’attente est composée actuellement de dix-huit jeunes hommes, pour un délai d’attente d’une année en moyenne. Pour les filles, il n’existe actuellement pas de structure avec des places fermées. Ce devrait toutefois être chose faite l’an prochain, dans le canton de Fribourg. Le projet Time Up devrait alors proposer quatre places fermées pour l’ensemble de la Suisse romande.

Pour pouvoir faire face à la hausse continue prévisible des affaires, le Tribunal des mineurs de Fribourg demande à l'Etat la création d’une cellule judiciaire complète, à savoir un juge, un greffier et un secrétaire supplémentaires. Il souhaite également pouvoir développer son service social avec davantage d'intervenants en protection de l'enfant. Le Tribunal des mineurs du canton de Fribourg compte actuellement 15,7 équivalents plein temps (EPT), dont 2,3 EPT répartis entre trois juges.

RadioFr. - Delphine Bulliard
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