"Ça fait 43 ans que j'attends ça"

Le soutien au mouvement de contestation en Iran vient aussi de la Suisse. Témoignages de deux Iraniennes installées à Fribourg.

Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs villes suisses pour soutenir le mouvement de résistance contre la répression iranienne, à Genève et à Berne notamment. © KEYSTONE

Deux femmes iraniennes, qui habitent le canton de Fribourg depuis plusieurs années, ont accepté de se confier au sujet du large mouvement de protestation contre le régime islamique. Afin de préserver leur sécurité, elles ont préféré rester anonymes. 

Elles ont choisi la chanson "Baraye" du compositeur Shervin Hajipour pour parler de la situation dans leur pays. "C'est un chanteur iranien connu qui a regroupé tous les messages du peuple et qui les a chantés", explique l'une d'entre elles. Aujourd'hui, cet hymne est chanté dans la rue, lors des manifestations, et même appris aux enfants.

Comme un lien immatériel avec leur pays, ce morceau est devenu le chant contestataire du peuple iranien. "Ça parle de la tristesse, de la vraie vie vécue par les enfants, les jeunes, les femmes. Le chanteur montre qu'il n'y a aucun respect là-bas."

Peu importe la distance

Vivre l'actualité mouvementée iranienne depuis Fribourg affecte beaucoup les deux femmes. Pour autant, elles ne se sentent pas impuissantes. "On est les porte-paroles des femmes en Iran, on va manifester à Berne, à Genève, on va justifier leur révolte. Même depuis ici, on est avec notre famille, nos proches, chaque région de l'Iran."

Pour elles, la différence se marque aussi au niveau générationnel. "Nos parents ont vécu la guerre et ne voulaient pas qu'on fasse ce qui était interdit. Maintenant, les mamans de ma génération peuvent soutenir leurs enfants."

L'espoir n'est donc pas mort pour les deux femmes, car une nouvelle génération porte les valeurs et se bat pour les faire reconnaître. "Aujourd'hui, les jeunes peuvent changer les choses, ils avancent malgré cette révolte, ce chagrin. Ça fait 43 ans que j'attends ça."

Des centaines de morts

Le mouvement de contestation a lieu depuis la mort de Mahsa Amini, 22 ans, à la mi-septembre. Selon les derniers chiffres publiés par des organisations comme l'ONG Iran Human Rights, plus de 380 personnes ont depuis été tuées. Des enfants et adolescents sont régulièrement victimes de cette répression sanglante du gouvernement iranien.

En Suisse, une commission du Conseil national a demandé ce mardi à la Confédération de reprendre les sanctions de l'Union européenne contre des membres du régime iranien. Jusqu'à maintenant, le Conseil fédéral a toujours refusé de le faire, tout en condamnant la répression.

RadioFr. - Isabelle Taylor / Adaptation Web: Rémi Alt
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