Le carnage continue dans la bande de Gaza affamée

Le Hamas étudie mardi une proposition de trêve à Gaza accompagnée d'une libération d'otages.

Aussitôt après l'annonce dimanche du retrait israélien de Khan Younès, des milliers de déplacés ont regagné la ville plus au nord pour découvrir un paysage apocalyptique. © KEYSTONE/AP/Fatima Shbair

Des habitants de retour à Khan Younès après le retrait des troupes israéliennes sont accablés par l'ampleur des destructions dans la grande ville du sud. Six mois après le début de la guerre, les opérations militaires israéliennes se poursuivent dans la bande de Gaza dévastée et au bord de la famine selon l'ONU.

Au Caire, les pays médiateurs — Qatar, Egypte, Etats-Unis — ont mis sur la table une nouvelle proposition en trois étapes, dont la première prévoit une trêve de six semaines, a indiqué lundi soir une source du Hamas. Disant "souhaiter" un accord, le mouvement a indiqué dans un communiqué qu'Israël "n'avait répondu à aucune" de ses demandes.

"Malgré cela, la direction du mouvement étudie la proposition (...) et informera les médiateurs de sa réponse", a ajouté le Hamas, à la veille de l'Aïd al-Fitr, la fête marquant la fin du mois du ramadan sacré pour les musulmans.

Le Hamas veut un cessez-le-feu définitif

Outre un cessez-le-feu de six semaines, la proposition prévoit dans un premier temps la libération de 42 otages en échange de 800 à 900 Palestiniens incarcérés par Israël, l'entrée de 400 à 500 camions d'aide alimentaire par jour et le retour chez eux des habitants du nord de la bande de Gaza, selon la source au sein du Hamas.

Le Hamas exige lui un cessez-le-feu définitif, le retrait israélien de l'ensemble du territoire palestinien et une augmentation importante des aides. L'acheminement par voie terrestre de celles-ci est strictement contrôlé par Israël qui assiège la bande de Gaza depuis le 9 octobre.

Sans souscrire à un cessez-le-feu définitif et un retrait de l'ensemble de la bande de Gaza, Israël a annoncé dimanche le retrait de ses troupes de Khan Younès, la plus grande ville du sud du petit territoire transformée en champ de ruines par les bombardements israéliens et des combats acharnés.

Affirmations d'Israël contredites par l'ONU

Tel Aviv a aussi fait état de l'entrée lundi de 419 camions d'aides dans la bande de Gaza, le nombre selon lui le plus élevé depuis le début de la guerre. Une affirmation contestée mardi par l'ONU, qui dit que les calculs d'Israël ne sont pas les mêmes que les siens et que les convois qui acheminent de la nourriture vers la bande de Gaza sont "trois fois plus bloqués" que les autres.

Le porte-parole des Affaires étrangères du Qatar Majed al-Ansari a dit à la BBC être plus "optimiste" qu'il y a quelques jours, mais selon lui, les négociations sont loin d'être dans leur dernière "ligne droite".

Dans la ville de Gaza (nord), une mission de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a résumé la dramatique réalité après une visite lundi à l'hôpital al-Chifa détruit lors d'une opération israélienne: "Cet endroit, qui était un lieu où l'on donnait la vie, n'évoque plus que la mort", a dit un médecin membre de la délégation, Athanasios Gargavanis.

Près de 33'400 morts

Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque en Israël, entraînant la mort de 1170 personnes, selon un bilan établi par l'AFP à partir des chiffres officiels israéliens. Plus de 250 personnes ont été enlevées et 129 restent détenues à Gaza dont 34 sont mortes, d'après Tel Avic.

En représailles, Israël a juré d'anéantir le mouvement islamiste palestinien qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007. Son armée a lancé une campagne de bombardements aériens intenses suivie d'une offensive terrestre, qui ont déjà fait 33'360 morts, en majorité des civils, selon un nouveau bilan mardi du ministère de la Santé du Hamas.

Destructions colossales

La guerre a aussi provoqué des destructions colossales, déplacé au moins 1,7 million de personnes sur les 2,4 millions d'habitants et entraîné une catastrophe humanitaire. "Les maisons, écoles, hôpitaux sont en ruines. Les enseignants, médecins, humanitaires sont tués. La famine est imminente", a fustigé la cheffe de l'Unicef, Catherine Russel.

A Deir el-Balah (centre), l'hôpital des Martyrs d'Al-Aqsa, a reçu dans la nuit des blessés, dont des enfants, certains portés par leurs parents, selon des images de l'AFP. Un garçon au visage ensanglanté assis par terre est traité par le personnel. Un autre Palestinien atteint aux jambes est transporté sur une civière.

Mardi, l'armée israélienne a annoncé dans un communiqué avoir détruit "des infrastructures terroristes" dans plusieurs secteurs de Gaza et qu'un "avion a éliminé un terroriste à Khan Younès qui avait participé au massacre du 7 octobre". Elle a fait état de combats dans le centre du territoire et de "l'élimination de plusieurs terroristes".

L'attaque sur Rafah reste programmée

Aussitôt après l'annonce dimanche du retrait israélien de Khan Younès, des milliers de déplacés ont regagné la ville plus au nord pour découvrir un paysage apocalyptique.

"Plus d'eau, plus d'électricité, plus de murs, plus de portes, il n'y a plus rien. Gaza n'est plus Gaza, c'est un endroit en ruines", lance une femme revenue à Khan Younès, qui refuse de donner son nom.

Israël a évoqué un retrait tactique de Khan Younès qui permettrait aux soldats de préparer "la poursuite de leurs missions dans la zone de Rafah", ville plus au sud collée à la frontière fermée de l'Egypte où s'entassent près de 1,5 million de Palestiniens en majorité des déplacés.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, déterminé à lancer une offensive terrestre à Rafah, dernier bastion selon lui du Hamas, a affirmé dimanche: "cela se fera - il y a une date". Sans la préciser.

Israël achète des tentes

En prévision de cette offensive, Israël veut acquérir un stock de tentes d'une capacité permettant d'abriter près de 500'000 personnes. "Je confirme qu'un appel d'offres a été ouvert, destiné à la bande de Gaza", a indiqué à l'AFP une source gouvernementale ayant requis l'anonymat, sans préciser où les tentes seront installées.

Washington a redit son opposition à une "invasion militaire massive de Rafah" tandis que Paris, Le Caire et Amman ont mis en garde contre les "conséquences dangereuses" d'une telle offensive.

ATS
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