Le cerveau trie les souvenirs durant le sommeil profond

De plus, associer une récompense à une information le pousse à la mémoriser durablement, selon une étude genevoise.

Le sommeil joue un rôle majeur dans la consolidation de la mémoire et la gestion des émotions. © Pixabay

De plus, associer une récompense à une information le pousse à la mémoriser durablement, selon une étude genevoise publiée dans la revue Nature Communications. Faute d’outils capables de traduire l’activité cérébrale, le contenu de la pensée durant le sommeil reste inaccessible. On sait pourtant que le sommeil joue un rôle majeur dans la consolidation de la mémoire et la gestion des émotions, a indiqué jeudi l'Université de Genève (UNIGE) dans un communiqué.

"Pour savoir quelles sont les régions cérébrales activées en sommeil et décrypter comment celles-ci permettent de consolider notre mémoire, nous avons mis au point un décodeur capable de décrypter l’activité du cerveau en sommeil profond", explique Virginie Sterpenich, chercheuse dans le laboratoire de la professeure Sophie Schwartz au Département des neurosciences fondamentales de l’UNIGE et investigatrice principale de cette étude.

"Nous voulions en particulier voir dans quelle mesure les émotions positives jouent un rôle dans ce processus", ajoute la spécialiste, citée dans le communiqué. En effet, en sommeil profond, l’hippocampe – une des structures du lobe temporal dont le rôle est de détecter les nouveautés – renvoie vers le cortex cérébral les informations qu’il a stockées durant la journée. Un dialogue s’installe et permet de consolider la mémoire en rejouant les événements de la journée et en renforçant le lien entre les neurones.

IRM, EEG et intelligence artificielle

Pour mener leur expérience, les scientifiques ont placé des volontaires dans une IRM (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle) en début de soirée et les ont fait jouer à deux jeux vidéo: un jeu de reconnaissance des visages semblable au "Qui est-ce?" et un labyrinthe en 3D dont il faut trouver la sortie.

Ces jeux ont été choisis, car ils activent des régions cérébrales très différentes et donc plus faciles à distinguer sur les images enregistrées par IRM. De plus, les jeux étaient truqués à l’insu des volontaires de telle sorte qu’on ne pouvait gagner qu’à un seul des deux jeux (la moitié des volontaires gagnait à l’un, et l’autre au second) pour que le cerveau associe au jeu gagné une émotion positive. Les volontaires ont ensuite dormi dans l’IRM une ou deux heures - soit la durée d’un cycle de sommeil - et l’activité de leur cerveau a été à nouveau enregistrée.

Les scientifiques ont combiné l’électroencéphalographie (EEG), qui mesure les états de sommeil, et l’IRM fonctionnelle, qui prend une photo de l’activité du cerveau toutes les deux secondes, puis utilisé un "décodeur neuronal" basé sur l'intelligence artificielle pour déterminer si l’activité cérébrale observée durant la période de jeu réapparaissait spontanément pendant la période de sommeil.

Le cerveau aime les récompenses

En comparant les IRM des phases de jeu éveillé et de sommeil, les scientifiques ont observé que durant le sommeil profond, les schémas d’activation cérébrale étaient très semblables à ceux enregistrés pendant la phase de jeu.

"Et très nettement, le cerveau revivait le jeu gagné et non le jeu perdu en réactivant les régions utilisées à l’éveil. Dès que l’on entre en sommeil, l’activité du cerveau change. Progressivement, nos volontaires ont commencé à repenser aux deux jeux, puis presque exclusivement au jeu gagné lorsqu’ils sont entrés en sommeil profond", indique Virginie Sterpenich.

Deux jours plus tard, les volontaires ont réalisé un test de mémoire: reconnaître tous les visages du jeu, d’une part, et retrouver le point de départ du labyrinthe, d’autre part. Là encore, plus les régions cérébrales du jeu étaient activées en sommeil, plus les performances mnésiques étaient bonnes.

Ainsi, la mémoire associée à une récompense est meilleure lorsqu’elle est spontanément rejouée durant le sommeil. Avec ces travaux, l’équipe genevoise ouvre une nouvelle perspective dans l’étude du cerveau endormi et du travail qu’il effectue toutes les nuits, conclut l'UNIGE.

ATS
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