Drame d'Epagny: la politique fribourgeoise monte au front
Le parti socialiste fribourgeois a demandé jeudi au canton d'assurer plus de places en maison d'accueil, suite au féminicide d'Epagny.

Le féminicide d’Épagny, qui a coûté la vie à une femme de 39 ans tuée par son mari sur son lieu de travail le 10 avril dernier, fait réagir la classe politique fribourgeoise.
Dans un communiqué publié cette semaine, le parti socialiste fribourgeois appelle le canton à prendre ses responsabilités. Deux élues socialistes, Marie Levrat et Lucie Menétrey, ont déposé un postulat demandant des solutions concrètes pour renforcer la protection des victimes.
Parmi les mesures proposées: le renforcement des structures d’accueil d’urgence, dont le manque criant est pointé du doigt. "La réponse à des féminicides tels que celui d’Epagny ne doit pas être l’insuffisance de financement des prestations si essentielles que celles de la protection des victimes", écrivent les deux élues, rappelant que les maisons d'accueil sont des refuges essentiels pour les femmes en danger.
Une réalité inquiétante
Le postulat souligne une augmentation préoccupante de la demande. En 2023, l’association Solidarité Femmes a enregistré 4'425 nuitées, contre 2'559 en 2000. La pression monte sur l'association, selon elles, puisqu'elle ne peut loger toutes les femmes dans des maisons d'accueil au nombre de chambres limité. En 2024, Solidarité Femmes a même dû héberger 33 femmes et 22 enfants à l'hôtel. Le taux d’occupation moyen des maisons d’urgence dépasse aujourd’hui les 100%, alors qu’il ne devrait pas excéder les 80%.
Le PS fribourgeois demande ainsi au Conseil d’État d’étudier la mise en place d’un quota minimal de places d’accueil d’urgence: une place pour 10'000 habitants, conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe.
Le gouvernement fribourgeois a cinq mois pour répondre à cette demande depuis le 24 avril.
Vers une reconnaissance juridique du féminicide?
Le 23 avril, les élus vert’libéraux Catherine Esseiva et Daniel Savary déposaient une motion exigeant la reconnaissance du féminicide comme crime spécifique dans le Code pénal suisse. "Cet événement tragique ne peut être considéré comme un cas isolé. Il s'inscrit dans une tendance persistante de la violence faite aux femmes dans la sphère domestique", affirment-ils dans leur communiqué.
Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique (OFS) leur donnent raison: 26 homicides sur les 45 recensés en 2024 ont été commis dans un cadre domestique. Parmi eux, 19 victimes ont été tuées dans une relation de couple actuelle ou passée, dont 17 étaient des femmes.
À l’heure actuelle, le droit pénal suisse ne reconnaît pas spécifiquement le féminicide. Pour les auteurs de la motion, cette lacune occulte la dimension structurelle de ces crimes et empêche une prise de conscience réelle.
Ils réclament une définition claire qui nomme le féminicide comme l’acte de tuer une femme en raison de son genre, souvent au terme de violences continues exercées par un partenaire ou un ex-compagnon.
Un débat cantonal et fédéral en perspective
Outre la reconnaissance pénale, plusieurs mesures cantonales doivent être encore pensées, d'après les motionnaires, telles que la création d’une unité spécialisée au sein de la police ou l’élargissement du recours aux bracelets électroniques.
Le Conseil d’État devra se prononcer sur la motion des Vert’libéraux d’ici au 23 septembre 2025. Elle sera ensuite soumise au Grand Conseil pour décision.