L'anti-Trump annoncé gagnant au Canada
Le parti libéral du premier ministre sortant Mark Carney est donné vainqueur des législatives canadiennes, selon les projections des médias lundi. Les résultats préliminaires ne permettent toutefois pas de déterminer s'il sera à la tête d'un gouvernement majoritaire.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir du libéral Justin Trudeau. Mais le retour de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.
A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale, l'annonce de ces premiers résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.
"Je suis si heureuse", lâche Dorothy Goubault, 72 ans, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente, car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".
"Chaos"
À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés. Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et du Royaume-Uni n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.
"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu. "Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.
Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place. Il a aussi annoncé vouloir développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.
En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.
Trump canadien
Pierre Poilievre aura souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.
Près de 29 millions des 41 millions d'habitants du Canada étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Un nombre record de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation.
Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin.
"C'est une élection unique", lâche Hamza Fahri, qui est ingénieur à Montréal. "J'ai vraiment changé d'avis récemment. Avant, je voulais que les libéraux partent". "Mais finalement, je vais voter Carney, car c'est un homme fort, sérieux et pour faire face à Trump, c'est de cela, dont le pays a besoin", affirme l'homme de 28 ans.
A Ottawa, Heather McAlister parle d'"une période qui fait peur". Elle a voté "pour un dirigeant qui va nous permettre de la traverser".