"J'ai ressenti une immense joie"

Bachar al-Assad est tombé en Syrie. Une libération pour beaucoup. Interview de Eisser Sleiman Cagin, Fribourgeoise d'origine syrienne.

Eisser Sleiman Cagin est arrivé à Fribourg il y a plus de vingt ans. © La Télé

La Télé: Vous avez créé votre association Passerelle Suisse-Syrie. Entre 2012 et 2022, vous êtes venue en aide aux millions de personnes déplacées de votre pays d'origine à cause de la guerre. Au lendemain de l'annonce de la chute du régime de Bachar al-Assad, quel est le sentiment?

Eisser Sleiman Cagin: J'ai d'abord été soulagée. Puis j'ai ressenti une immense joie. On se dit que c'est enfin terminé. Cependant, j'ai des craintes, tout comme beaucoup de personnes laïques qui souhaitent une démocratie. Nous ne savons pas à quoi s'attendre pour l'avenir de la Syrie.

Vous travaillez aussi à Caritas. Vous avez échangé avec des personnes syriennes ces dernières heures. Que vous êtes-vous dit?

Le sentiment principal est la joie. Beaucoup de réfugiés sont arrivés depuis 2011 dans l'agglomération de Fribourg. Avant, il n'y en avait que quatre ou cinq familles. Désormais, elles sont des centaines. Les gens ont énormément souffert de la guerre. Pour l'instant, la communauté syrienne ne réfléchit pas encore à l'avenir. La joie prévaut.

Le pouvoir a été pris par le groupe islamiste Hayat Tahrir Al-Cham. Vous dites qu'il faut faire attention.

Il reste un groupe islamiste. C'est surtout un nouveau pouvoir et un nouveau régime. Même si les premières déclarations disent qu'il sera ouvert à tous les Syriens, l'expérience des autres pays ayant connu une situation similaire montre que ces mouvements n'ont pas démontré une politique inclusive. En Syrie, il y a beaucoup d'ethnicités. La place de la femme est aussi importante. On se demande s'il y aura des mesures qui seront prises à notre encontre. En outre, nous ne savons pas ce qu'il se passera pour les minorités comme les Kurdes, les Russes ou les Chrétiens.

Comment se positionnent les Syriens de Fribourg désormais? Souhaitent-ils rentrer au pays?

Les personnes avec qui j'ai discuté sont plutôt dans l'incertitude. Ils ne sont pas au point de se demander s'ils vont retourner ou non en Syrie.

La Télé - Camille Tissot / Adaptation web: Théo Charrière
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