Les locataires sont toujours plus sous pression

L'ASLOCA craint "une bombe sociale à retardement". Entretien avec le vice-président de l'association à Fribourg.

Mathieu Loup, vice-président de l'ASLOCA Fribourg, explique les enjeux de la pression que subissent les locataires. © La Télé

L'Association suisse des locataires (ASLOCA) a tiré la sonnette d'alarme cette semaine. Les loyers explosent, et l'augmentation du coût de l'énergie augmente la pression sur les locataires. La faitière craint une "bombe sociale à retardement" : elle a présenté cette semaine un catalogue de revendications politiques en faveur des locataires. 

Le canton de Fribourg n'échappe pas à ce constat. "Un point est particulièrement préoccupant ici: l'augmentation des loyers dans les centres urbains", pointe le vice-président de l'ASLOCA Fribourg. Si cette pression ne peut pas être comparée depuis Fribourg aux métropoles comme Zurich ou Bâle, "les principes sont les mêmes". Les biens qui arrivent aujourd'hui sur le marché ont un loyer nettement supérieur à la moyenne pour les baux conclus dans les douze derniers mois.

"Cette hausse est véritablement problématique puisqu'elle va de pair avec une baisse du pouvoir d'achat et qu'elle alimente des rendements que l'on considère comme abusifs", souligne Mathieu Loup. Selon l'organisation, les loyers abusifs privent aujourd’hui les ménages suisses de milliards de francs chaque année, 10,4 milliards de francs en 2021. 

Fissures sociales inutiles

Cette problématique va pousser les gens à revenus faibles et moyens à un stade où se loger dans les agglomérations deviendra compliqué et devront s'établir en périphérie. "Ce déplacement implique de nouveaux besoins au niveau de la mobilité, ce qui pourrait à terme créer des fractures sociales importantes, ainsi qu'une perte de mixité sociale dans les centres urbains", s'inquiète Mathieu Loup.

Quand tout le système repose sur le locataire pour lutter contre les loyers abusifs, c'est ça le véritable problème.

Malgré tout, le droit du bail prévoit un certain nombre de correctifs pour défendre le locataire. "Le seul problème, c'est que c'est au locataire en permanence de les activer." Par exemple, pour contester son loyer initial, il faut attendre d'avoir signé son contrat de bail pour faire valoir le mécanisme de protection.

Une gestion qui confère trop de responsabilités à un locataire, pour qui il est important d'entretenir de bons rapports avec son bailleur. "Quand tout le système repose sur le locataire pour lutter contre les loyers abusifs, c'est ça le véritable problème", relève Mathieu Loup. Ainsi, l'ASLOCA demande un retour à un contrôle étatique des loyers, comme cela se faisait dans les années 60.

Problème de rentabilité

Aujourd'hui, en ville de Fribourg, le problème touche principalement les grands appartements. "Il y a une concurrence entre les colocations étudiantes et les familles avec des enfants. On met en concurrence différents groupes sans que ce soit véritablement nécessaire." C'est ainsi que se créent les fractures sociales, d'après le vice-président de l'association à Fribourg.

Mais une fois encore, c'est une question de rendement qui sous-tend les enjeux. "Pour un bailleur, réaliser plusieurs petits appartements sera plus rentable que d'en réaliser quelques grands", appuie Mathieu Loup. Il y a alors une inadéquation entre ce dont les gens ont besoin, et les biens disponibles sur le marché.

La Télé - François-Pierre Noël / Adaptation Web: Rémi Alt
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