Ukraine: les députés français en soutien
Les députés français ont apporté mardi soir un large soutien à un accord de sécurité conclu entre Paris et Kiev, malgré l'abstention de l'extrême droite et l'opposition de la gauche radicale. Le gouvernement a mis en garde contre le "cataclysme" d'une victoire russe.
Après de longs débats, 372 députés ont voté pour et 99 contre, a annoncé la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet à l'issue de ce vote non contraignant mais éminemment symbolique.
Le Premier ministre Gabriel Attal a défendu un peu plus tôt la stratégie française d'aide à l'Ukraine devant les députés, insistant sur les "risques concrets" et "tangibles" d'une victoire russe sur "la vie quotidienne" des Français, un "cataclysme pour leur pouvoir d'achat".
"Tourner le dos à notre histoire"
Il avait donné le coup d'envoi des débats en rendant "hommage à la résistance exceptionnelle du peuple ukrainien", applaudie par les députés, debout, le jour même où les Etats-Unis ont annoncé une nouvelle aide militaire de 300 millions de dollars à l'Ukraine, bien loin de la grande enveloppe réclamée par le président Biden, toujours bloquée au Congrès.
Voter contre la stratégie d'aide française, ce serait "tourner le dos à notre histoire", a plaidé le Premier ministre français. "Nous ne nous fixons pas de limite face à la Russie qui elle n'en fixe aucune", a-t-il souligné, après les déclarations controversées d'Emmanuel Macron, qui n'a pas exclu l'envoi de troupes occidentales au sol.
Après le vote, les deux principales chaînes françaises ont annoncé qu'Emmanuel Macron s'exprimerait sur l'Ukraine à la télévision jeudi à 20h00.
Coopération militaire renforcée
Le vote de mardi portait sur l'accord de sécurité franco-ukrainien du 16 février. Conclu pour dix ans, il comprend un renforcement de la coopération militaire, en particulier dans les domaines de l'artillerie et de la défense aérienne.
Le parti d'extrême droite de Marine Le Pen, Le Rassemblement national (RN), souvent accusé d'être pro-Kremlin, s'est abstenu, évoquant des "lignes rouges" parmi lesquelles l'envoi de troupes au sol et l'adhésion possible de l'Ukraine à l'Otan et à l'Union européenne.
"Vous avez (...) détourné, exploité et instrumentalisé une crise internationale majeure pour la mettre au service d'un agenda électoraliste de court terme" avant les élections européennes, a accusé Marine Le Pen avant le vote. "Soit on est pro-Macron, soit on est accusé d'être pro-Poutine", a-t-elle lancé à l'Assemblée.
Trois milliards d'euros en 2024
En 2024, Paris promet désormais de fournir "jusqu'à trois milliards d'euros de soutien supplémentaire". "Ces trois milliards ne sont pas un chèque à l'Ukraine. Ils correspondent à la valeur maximale de notre aide militaire en 2024, notamment aux commandes passées auprès de nos industries de défense françaises", a expliqué le ministre des Armées Sébastien Lecornu.
A trois mois des élections européennes du 9 juin, l'aide à l'Ukraine est devenue un des thèmes clés de la campagne, particulièrement depuis les propos fin février d'Emmanuel Macron qui n'a pas écarté l'envoi de troupes au sol et ne veut mettre "aucune limite" dans le soutien à Kiev. Ces déclarations ont suscité de fortes polémiques en France et en Europe, particulièrement avec l'Allemagne.
Depuis, Sébastien Lecornu a assuré que l'envoi "de troupes au sol combattantes n'était pas sur la table" et le président Volodymyr Zelensky s'est voulu rassurant lundi en affirmant à des médias français que "tant que l'Ukraine tient, l'armée française peut rester sur le territoire français".
Opinion publique peu favorable
Le président Emmanuel Macron a mis l'aide accrue à l'Ukraine au coeur de ses priorités mais l'adhésion à ce soutien financier et militaire recule dans l'opinion française.
Un sondage Elabe pour la chaîne BFMTV et le journal La Tribune dimanche montre que 39% des Français considèrent que la France doit continuer de soutenir économiquement et financièrement Kiev comme elle le fait actuellement, soit 11 points de moins qu'à la fin juin 2023. Et davantage de Français (26%, +3 points) estiment qu'elle doit réduire son soutien.