Un coiffeur accusé d'avoir violé son apprentie

Le procès d'un coiffeur accusé de viols par son ancienne apprentie a eu lieu lundi à Fribourg. Les faits auraient eu lieu il y a 15 ans.

La justice rendra son verdict le 9 décembre. (image prétexte) © KEYSTONE

Que s'est-il passé entre mars 2009 et août 2011 dans un salon de coiffure de la ville de Fribourg? Une ancienne apprentie accuse son patron de l'époque de l'avoir violée et contrainte sexuellement.

Le procès, qui a eu lieu lundi matin au Tribunal d'arrondissement de la Sarine, comporte plusieurs faits notoires, notamment qu'une partie des faits remontent à plus de 15 ans en arrière, rendant difficile leur reconstruction. 

"En l'absence de preuve matérielle, il faudra trancher entre les deux versions", a d'ailleurs annoncé la procureure Sonja Hurni au début de son réquisitoire. Comme un oracle, c'est sur la crédibilité des récits de leur client respectif que les avocates ont également axé leurs argumentations.

La version de l'apprentie

D'un côté, il y a une jeune femme âgée de 18 ans à l'époque. En 2008, elle entame sa formation de coiffeuse dans un salon de Fribourg. Sa première année d'apprentissage se passe mal. Elle décide alors de changer de salon. En 2009, elle est embauchée par un ami de son beau-père en tant qu’apprentie en 2e année. C'est cet homme, son nouvel employeur, âgé de 33 ans à l'époque, qu'elle accuse aujourd'hui. 

Elle l'accuse de l'avoir violée, notamment dans sa voiture, un soir, sur un parking derrière un bistrot de Neyruz, en rentrant d'un souper de boîte. Et puis, elle aurait vécu l'emprise au travail. Chaque jour, son patron aurait frotté son sexe contre elle, alors qu’elle s’occupe de client au bac à shampoing. 

Il y aurait aussi eu les fellations forcées dans le local de pause. Il serait devenu toujours plus insistant et lui aurait imposé ces gestes jusqu'à la fin de son apprentissage en été 2011. Si elle ne le satisfaisait pas, il la menaçait de ruiner sa carrière. Apeurée, elle se serait exécutée.

Aujourd'hui, cette femme est encore traumatisée par ce qu'elle a vécu, selon son avocate. Elle n'a d'ailleurs pas pu se présenter devant le tribunal ce lundi. "Elle a fait des crises de paniques à répétition ces derniers jours. Elle s'en excuse", a expliqué son avocate, qui a décrit comment cette affaire avait brisé la vie de sa cliente. "Elle n'arrive pas à s'occuper de son enfant."

Pourquoi n'a-t-elle porté son récit que des années plus tard, en 2022? Ce cas n'est pas unique, selon la procureure Sonja Hurni: "Souvent les victimes ne se livrent pas dans l'immédiat. Elles ont besoin de temps pour le faire. C'est un mécanisme d'autodéfense. Et cela ne doit pas remettre en doute la crédibilité de son témoignage."

Pendant une décennie, la jeune femme aurait ainsi été en état de sidération pour se protéger. Un événement récent — on ignore lequel — aurait levé "son amnésie".

Face à celle du patron

De l'autre côté, il y a un Fribourgeois, 33 ans au moment des faits, qui se décrit comme "exigeant professionnellement". Certains le dépeignent comme colérique, impulsif, sévère, violent parfois et obsédé par les femmes. 

Il reconnait avoir eu une relation sexuelle consentie avec son apprentie, mais conteste toutes les accusations. À la question de savoir si sa position de patron lui a permis d'avoir ces relations avec son apprentie, il répond: "Je ne me suis jamais posé la question".

Et à celle de savoir si son apprenti ressentait une pression particulière parce qu'il était son second employeur? Il répond: "Non, je ne pense pas."

Lundi au tribunal, cet homme, en costume bleu clair, foulard autour du cou, a émis des regrets. "Je n'aurais pas dû céder à ses avances. C'était stupide de ma part. C'était une jolie fille. J'ai cédé, j'aurais dû dire non." 

Il l'assure et l'a répété devant la justice: c'est elle qui lui a fait des avances. Il a fini par céder. Son avocat a appelé à ne pas faire le procès de la personnalité ou de la sympathie de son client, mais des faits qui lui sont reprochés.

Elle a aussi regretté à plusieurs reprises l'absence de la victime présumée et a mis en exergue la difficulté de reconstruire des faits qui se sont déroulés il y a plus d'une décennie et le "flou" qui en émanent. 

Le Ministère public demande 3 ans de prison et 25'000 francs d'indemnité pour tort moral. La défense veut l'acquittement. Le verdict sera rendu la semaine prochaine. 

RadioFr. - Vincent Dousse
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