Un dimanche de votation qui "ne sert presque à rien"
La presse revient sur le rejet de l'initiative des Jeunes Vert-e-s pour la responsabilité environnementale. Tour d'horizon.

Un dimanche de votation qui "ne sert presque à rien", écrit le Temps. Des craintes pour la prospérité du pays. La presse suisse prend acte du non sans appel à l'initiative "utopique" des Jeunes Vert-e-s sur la responsabilité environnementale dimanche.
"Pas de suspens, pas de surprise et malheureusement presque pas de campagne": Le Temps regrette un dimanche de votation qui n'a servi "presque à rien". La question posée aurait pourtant dû déchaîner les passions, générer des débats philosophiques interminables. Malheureusement, ce fut le calme plat, commente le quotidien.
"On peut supposer que ce sujet lasse déjà et surtout, cette initiative n'était pas du tout prioritaire pour les partis ou les différentes associations environnementales. Les jeunes pousses vertes étaient bien isolées", écrit-il.
L'utopie des Jeunes Vert-e-s
"Le débat n'a même pas pris", abondent 24 Heures et la Tribune de Genève. Pour eux, plusieurs facteurs expliquent ce peu d'intérêt. Les montants engagés – environ 230'000 francs pour les initiants et 450'000 pour les opposants – n'ont pas permis d'occuper le terrain. Et les initiants n'ont pas réussi à sortir des arguments chocs, avec leur "concept complexe" de limites planétaires.
En face, "l'argument du porte-monnaie a certainement fait mouche". Le discours du camp bourgeois était plus clair et percutant: les prix auraient grimpé.
Les initiants "ont rêvé d'un autre monde. Un monde où les Suisses réduiraient leur consommation – et ainsi leur empreinte carbone – jusqu'à respecter les limites planétaires. La réalité les a rappelés à l'ordre", écrivent les deux journaux lémaniques.
Adapter son mode de vie. Ou pas.
"Les Suisses qui ont voté ne veulent pas adapter drastiquement leur mode de vie pour prendre soin de la planète", écrit le TagesAnzeiger. A ses yeux, "c'est compréhensible".
"L'initiative demandait la protection de l'environnement au forceps". La Suisse aurait dû réduire sa consommation en l'espace de dix ans, ce qui "aurait nécessité des coupes sévères dans l'économie", explique le quotidien alémanique.
Un avis partagé par La Liberté. "La mise en oeuvre du texte des Jeunes Verts signifiait une remise en cause radicale du mode de vie de la population helvétique, à laquelle elle n'est pas prête à consentir", écrit-elle.
Le beurre et l'argent du beurre
"Une baisse de la prospérité n'est pas acceptable pour une majorité", avance l'éditorialiste de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ). C'est la raison pour laquelle l'initiative des Jeunes Vert-e-s s'est "fracassée" dans les urnes.
"Les Suisses sont-ils favorables à un monde meilleur ? - Bien sûr, mais cela ne doit pas coûter trop cher", lit-on dans la NZZ. "Qu'il s'agisse de politique environnementale, de politique européenne ou d'autres thèmes: Il existe à chaque fois des majorités pour la même position de base - on veut le beurre et l'argent du beurre."
"Davantage de protection de l'environnement sans perte de prospérité. Plus de prospérité sans davantage d'immigration. Des salaires plus élevés et moins de stress. Des rentes plus élevées sans travailler plus longtemps", énumère le quotidien zurichois.
Flop attendu
Pour les journaux du groupe alémanique CH Media, "les exigences de l'initiative n'étaient pas seulement difficiles à saisir, elles étaient surtout utopiques. Un oui aurait signifié que l'économie aurait dû être complètement transformée en l'espace de dix ans", lit-on dans l'éditorial de CH Media.
"Il ne sert à rien de poser des exigences qui ne sont pas réalisables. (...) Il serait plus judicieux de consacrer son énergie et son engagement à des mesures réalistes et susceptibles de recueillir une majorité", avance l'éditorialiste. "Les pas en direction de la protection du climat et de l'environnement sont certes plus petits. Mais au moins, on va de l'avant".
Un pays conservateur
Le rejet de l'initiative s'inscrit dans la lignée des initiatives des Jeunes socialistes pour un plafonnement des salaires dans les entreprises (initiative 1:12) et pour des impôts plus élevés sur les revenus du capital (initiative 99%), qui ont également échoué dans les urnes, estime la radio-télévision alémanique SRF.
"Les jeunes partis de gauche doivent reconnaître qu'ils ont certes des espaces de liberté pour des utopies politiques - mais qu'il est très difficile en Suisse de trouver une majorité politique pour cela", ajoute-t-il. Petite consolation pour les jeunes des partis de gauche, l'initiative sur les retraites des jeunes PLR, qui demandait un âge de la retraite plus élevé, a elle aussi "magistralement échoué dans les urnes".