Depuis la Veveyse jusqu'au rallye Dakar
Edouard boulanger habite aux Paccots, mais il se rendra bientôt en Arabie Saoudite pour le départ du Dakar. À quelques mois du départ, il nous partage son expérience.
Vous venez de remporter le rallye du Maroc avec Sébastien Loeb. Est-ce qu'on peut dire que votre duo a rapidement trouvé ses marques?
Oui, c'est vrai qu'on a commencé ensemble à la fin de l'été. Le rallye au Maroc était la deuxième course, la première étant le rallye au Portugal au mois de septembre. Directement en tant qu'équipage, on s'est bien trouvé. On a été ralenti par un souci mécanique au Portugal mais malgré tout, on fait le podium et au Maroc, on gagne. Donc c'est vrai qu'en tant qu'équipage, on s'est bien trouvé.
Au-delà du résultat au Maroc, vous tirez quoi comme enseignement pour le Dakar?
Notre équipe Dacia arrive à maturité. Cela fait une année complète que le team et la voiture existe. Elle a évolué au fur et à mesure. Le Dakar est une épreuve de 15 jours où le premier ennemi est la fiabilité de la voiture. Après une année, on arrive avec un niveau de confiance que l'on n'avait clairement pas l'année passée. On est dans un cas de figure où on arrive relativement serein, même si le Dakar est une histoire à soi et bien sûr, il va y avoir une série de challenges à passer, mais la phase de préparation se présente bien.
Cela fait plusieurs années que vous côtoyez Sébastien Loeb dans le sport mécanique. Quand on est dans l'habitacle de la voiture, est-ce que c'est à vous de vous adapter ou l'inverse? Comment on s'organise?
On a fait un pas vers l'autre tous les deux. Sébastien est un pilote exceptionnel donc il a des prétentions en termes de communication que mes pilotes précédents n'avaient pas. À l'inverse, moi, j'ai une expérience en rallye raid qui est plus grande que la sienne. On a besoin de trouver notre équilibre et cela serait contre-productif qu'il y en ait qu'un qui fasse l'effort. C'est clairement un effort mutuel.
Être copilote est un rôle en soi. C'est un peu plus que rouler tout droit dans le sable, non ?
C'est 15 jours d'affilée et 10'000 kilomètres de chrono. On est sanglé dans la voiture entre 10 à 12 heures par jour et les habitacles sont chauffés à 50 degrés. Quand on joue la victoire, ça se joue à des secondes près tous les jours donc c'est intense. Après, 90% des équipages sont là juste pour terminer l'épreuve, donc cela reste un challenge, mais c'est une autre dimension.
Sur les rallyes raid, vous découvrez votre feuille de route cinq minutes avant de prendre le départ. C'est un sacré challenge ça non ?
Dans notre métier, c'est le plus gros challenge. Le métier de copilote est souvent associé au WRC ou aux pilotes de rallye conventionnel. Eux ont le droit à des passages de reconnaissance et la vidéo donc ils peuvent répéter leur copie. Nous, on monte dans la voiture sans savoir où l'on va et la seule information que l'on a, c'est où on va dormir le soir. On doit guider notre pilote avec des informations que l'on découvre kilomètre après kilomètre. C'est de l'improvisation permanente. On a quelques secondes pour digérer l'information et la transmettre dans le bon langage et dans le bon timing pour que cela soit efficace. C'est vrai que le rallye raid est totalement différent du rallye conventionnel
Le Dakar, c'est le Graal. Vous l'avez remporté en 2021 avec un certain Stéphane Peterhansel. Faire équipe avec celui dont on avait un poster dans sa chambre en étant enfant devrait être spécial non ?
C'était un job particulier. C'était extrêmement enrichissant, mais c'est vrai que c'est une personne tout à fait particulière pour moi. Il n'y a pas eu une seconde de tension entre nous. On a eu des moments très difficiles, mais on a gardé un lien très fort de ces années-là.
Vous avez bercé là-dedans depuis tout petit?
Mon père vient d'une petite ville au nord de la France qui s'appelle le Touquet. Là-bas, il y avait un certain Thierry Sabine, qui a créé l'Enduro du Touquet. Papa était un ami de Thierry Sabine donc j'ai grandi avec les images du Dakar à la maison. Avec mon frère, on se levait tôt le matin pour regarder les images du Trocadéro. Ça fait partie de mon paysage d'enfance. J'ai grandi en me disant qu'un jour, je voudrais faire ça. Au fur et à mesure, le rêve fait son chemin, mais c'est sûr que je n'ai pas lâché l'histoire.
Il y a le sport mécanique, mais aussi le sport en général. Vous êtes président d'un club d'athlétisme à Châtel-saint-Denis, vous faites de la peau de phoque, du vélo, du rameur...
Tous les sports en extérieur m'intéressent. À partir du moment où on est en plein air, c'est cool
Il ressemble à quoi votre programme jusqu'à Dakar 2026?
Préparation physique dans le sens où la voiture se fait une beauté jusqu'à la fin du mois. Ensuite, les véhicules sont expédiés en Arabie Saoudite par bateau. Nous, on n'a rien à faire avec la voiture jusqu'en janvier, mais par contre, on a un gros boulot de préparation physique, mentale et de cohésion. Ce sont deux mois durant lesquels on est un peu plus autonomes, mais des mois qui sont clés. S'il y a de la neige, il y aura aussi un peu de ski aux Paccots. On ne peut pas regarder cela depuis la fenêtre sans y aller.


