Ces Fribourgeois qui ont chanté à l'Eurovision
Gjon's Tears, Arlette Zola, Carol Rich et Véronique Müller ont déjà représenté la Suisse au concours européen de la chanson. Retour sur leurs parcours.
Sans chichi: Véronique Müller (1972)
En 1972, la Fribourgeoise Véronique Müller représente la Suisse à l’Eurovision à Édimbourg avec "C’est la Chanson de mon Amour". La scène est simple: elle chante assise sur un tabouret haut, guitare à la main. À l’époque, pas de mise en scène grandiose. "Je pouvais faire ce que je voulais sur scène", a-t-elle raconté à WirFreiburg. Sa robe de scène est un ensemble blanc orné de fleurs orange, cousu par sa mère. Le résultat? 8e place, pour 88 points, 8e à passer sur scène.
Originaire de Morat, Véronique Müller grandit entre deux langues et deux cultures, nourrie de musique depuis l’enfance. Grâce à sa prof de chant, elle décroche un contrat à Paris. C’est au Palace de St-Moritz qu’elle remporte la sélection suisse à 24 ans.
Aujourd’hui, à 77 ans, elle vit toujours à Fribourg. Elle reste fidèle au style chanson française et apprécie la nouvelle génération: "Le morceau de Zoë Më est poétique et joueur. Elle a du caractère, ça se sent."
Sur le podium: Arlette Zola (1982)
Le 24 avril 1982, à Harrogate en Angleterre, la Fribourgeoise Arlette Zola (de son vrai nom Arlette Jaquet) monte sur la scène de l’Eurovision pour interpréter "Amour on t’aime". Ce soir-là, elle termine à la 3e place sur 18 – une performance exceptionnelle pour la Suisse, la meilleure depuis 19 ans.
À 33 ans, c’est un retour en force pour celle qui avait été célèbre dans les années 60. Après une pause, le Concours Eurovision marque son grand comeback. "J’avais participé à tellement de concours… L’Eurovision était le dernier rêve à réaliser", dit-elle. Avant le concours, elle est partout: " J’étais épuisée, tout le monde voulait quelque chose de moi." Mais une fois sur place en Angleterre, l’ambiance est magique." Le jour J, elle passe en 7e position, qu’elle considère depuis comme son chiffre porte-bonheur.
À son retour, tout le village de Léchelles l’accueille sur un tapis rouge. Les enfants chantent sa chanson, tout le monde a regardé le concours à la télé. Après cette belle aventure, elle continue sa carrière quelques années, puis se retire un temps. En 1998, elle revient dans l’émission d’Alain Morisod avec "Laissez-moi encore chanter". Depuis quelques années, la scène n’est plus d’actualité pour raisons de santé, mais la musique reste au cœur de sa vie. Et chaque année, elle regarde encore religieusement l’Eurovision.
Paillettes et rock: Carol Rich (1987)
En 1987, la Fribourgeoise Carol Rich, de son vrai nom Anne-Lyse Corpataux et originaire de la Glâne, représente la Suisse à l’Eurovision à Bruxelles avec sa chanson "Moitié, moitié". À seulement 25 ans, elle se démarque avec un morceau pop-rock, audacieux pour l’époque, bien loin des ballades classiques qu’on entendait alors au concours.
Sur scène, elle porte une robe bleue parsemée d’étoiles blanches, une veste assortie et des bottes de cowgirl dans les mêmes tons. Ses cheveux, crêpés à souhait, lui donnent une allure énergique. Elle est la dernière à passer ce soir-là, ce qui ne la rassure pas: elle attend longtemps, n’arrive pas à se concentrer, ne mange rien. Malgré tout, elle saute sur scène avec enthousiasme et se donne à fond. Elle termine à la 17e place sur 22, un peu frustrée, mais garde un bon souvenir de l’aventure: " C’était un moment incroyable, une expérience unique." Et elle reconnaît la victoire méritée du chanteur irlandais Johnny Logan.
Ce n’était pas son premier essai: trois ans plus tôt, elle avait déjà tenté de participer avec la chanson "Tokyo Boy". Même si elle n’avait pas gagné la sélection nationale, ce morceau est resté culte pour elle. "C’est là que tout a commencé. "Tokyo Boy", on l’écoute encore aujourd’hui."
Formée au Conservatoire de Fribourg, Carol Rich a étudié l’opéra, mais son rêve a toujours été de créer son propre style en mêlant le classique au moderne. Elle chante tout : schlager, pop, rock, gospel, a cappella. Après l’Eurovision, elle part à Paris, enregistre de nouveaux morceaux, et continue sa carrière malgré quelques pauses. Elle tente un retour à l’Eurovision en 1991, sans succès, mais ne quitte jamais vraiment la scène.
Aujourd’hui encore, elle se produit régulièrement. Et parmi ses fiertés, il y en a une qui sort du lot: elle a été la première femme à chanter publiquement le Ranz des Vaches.
Une voix marquante: Gjon's Tears (2021)
Quatre ans après son triomphe à Rotterdam, Gjon’s Tears revient sur la scène de l’Eurovision, cette fois en tant qu’invité lors de l’édition à Bâle. Il s’y produira aux côtés de Zoë Më, la candidate suisse de l'édition 2025. Une amie qu’il connaît depuis leur passage commun à La Gustav en 2018.
Pour Gjon’s Tears, alias Gjon Muharremaj, l’Eurovision, c’est une histoire de rêve d’enfant. À 13 ans, en zappant avec son frère et son cousin, il tombe par hasard sur le concours. Une chanteuse albanaise chante dans sa langue natale, et ce soir-là, il rêve qu’un jour, ce sera lui.
Il poursuit sa passion, participe à The Voice France, rejoint un camp de composition, et c’est là qu’il écrit "Tout l’univers", la chanson qui le propulsera au concours. Le contexte est particulier: en pleine pandémie de Covid, il aurait dû participer en 2020 avec "Répondez-moi", mais l’édition est annulée. Malgré cela, son interprétation touche l’Europe. En 2021, il termine 3ᵉ du concours, derrière Maneskin (Italie) et Barbara Pravi (France).