Une voile pour des cargos plus écolos
A Givisiez, le centre de recherche technique de Michelin a développé une aile innovante testée en ce moment au large d'Estavayer.

Imaginez des cargos ou des pétroliers en mer dotés d'immenses voiles gonflables. De la science-fiction? Pas tout à fait. C'est peut-être ce que l'on verra, en mer, dans plusieurs années, grâce à une voile gonflable de 17 mètres de haut, au design qui évoque immédiatement le célèbre bibendum blanc.
Le projet a mobilisé pendant un an et demi une dizaine de personnes du centre de recherche et technique de Michelin, basé à Givisiez. Le centre compte une cinquantaine de collaborateurs spécialisés dans la mobilité durable, en dehors du domaine des pneus, produit phare du groupe français.
Des cargos moins polluants
Cette aile blanche portée par un mât rétractable pourra à terme équiper les cargos, pour réduire leur impact carbone. "Selon nos projections, cette voile permettra de réduire la consommation de diesel des cargos de 10 à 20%", explique Christophe Penot, directeur du centre de recherche Michelin à Givisiez. Le potentiel est immense: le transport maritime représente 3% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde aujourd'hui.
Pour l'heure, cette innovation est testée sur le lac de Neuchâtel, au large d'Estavayer, sur le voilier du navigateur français Michel Desjoyeaux. Les essais viennent de débuter. "Il faut encore procéder à plusieurs ajustements", observe Cédric Savio, ingénieur en électricité depuis 20 ans chez Michelin. "A terme, le mat télescopique devra se déployer automatiquement, comme la voile. Il s'orientera selon la direction du vent."
Les réglages sont parfois sportifs. "Ce n'est pas comme en voiture, quand on met au point des pneus ou un véhicule électrique, on peut tirer le frein à main et s'arrêter un moment, souffler. Là, ce n'est pas possible, on est en plein milieu du lac, il y a toujours du vent et des vagues, il faut se concentrer", commente Pierre-Alain Magne, chef de projet au sein du centre de recherche et technique de Michelin.
Bientôt la pleine mer
Les essais doivent se poursuivre sur le lac de Neuchâtel jusqu'à fin juillet. Cet automne, le dispositif sera testé en pleine mer pour la première fois, sur la côte Atlantique, probablement vers Royan.
L'équipe du centre de recherche de Michelin à Givisiez espère ensuite équiper un bateau de la navire marchande en 2022, pour d'autres ajustements, tout aussi primordiaux. Elle a déjà trouvé un cargo partenaire. Elle travaille aussi avec d'autres collaborateurs de Michelin, basés en France, pour la partie commerciale notamment.
A l'origine, cette idée est une invention du Suisse Edouard Kessi, marin - vainqueur du Bol d'or notamment - et spécialiste des membranes de voile. C'est notamment lui qui a réalisé le hangar gonflable de Solar Impulse, la structure qui a protégé l’avion pendant son tour du monde.