En guerre avec son supérieur, une policière est acquittée
Cette affaire judiciaire hante la police cantonale fribourgeoise depuis plus de trois ans. Elle oppose une inspectrice et son supérieur.

"Le hashtag MeToo a fait de bonnes choses, je le dis sincèrement, sans arrière-pensée, mais on voit qu'il y a des effets néfastes aussi… néfastes à la vindicte populaire."
Voilà les mots d'un chef de bridage de la police fribourgeoise à l'issue du verdict rendu par la justice mardi matin. Quelques minutes plus tôt, dans la salle d'audience, l'homme réagissait d'un haussement de sourcil à sa défaite, se retournant vers le public qui était venu le soutenir.
Ce cadre de la police fribourgeoise, crâne rasé et barbe poivre et sel, accusait sa subordonnée de calomnie. Il demandait 1'000 francs en dédommagement pour tort moral. La justice ne l'a pas entendu.
Ce verdict est une nouvelle étape dans une affaire qui bouscule la police fribourgeoise depuis trois ans. Rembobinons.
Une affaire d'allaitement
Tout commence en 2022. Une inspectrice de la police cantonale est en conflit avec son chef de brigade. Au cœur du problème: les absences répétées de celles-ci pour pouvoir allaiter son enfant.
Irrité, il l'aurait notamment traitée de "vache à lait". Une enquête est alors ouverte pour tenter de faire la lumière sur cette affaire.
Les deux parties se sont retrouvées mardi matin devant le tribunal de la Sarine. Cette fois-ci, les rôles sont inversés. La femme de 36 ans est l'accusée, son chef la victime.
Pas de calomnie
Pendant la procédure, la policière décrit son supérieur comme sexiste, coupable de harcèlement et de mobbing. D'après elle, sa situation n'est pas un cas isolé et d'autres collègues sont, eux aussi, en conflit ouvert avec lui. Choqué par ces déclarations qui nuisent à sa réputation, le principal intéressé décide alors de déposer une plainte pénale contre sa subordonnée pour calomnie.
Mais pour la justice fribourgeoise, la calomnie ne peut pas être retenue dans cette affaire.
Pourquoi? Parce que tout ce qu'a dit la policière, elle l'a fait dans le cadre d'une procédure qui aurait dû rester confidentielle. Elle s'est confiée à un enquêteur externe en charge de faire la lumière sur ce conflit. Elle ne pouvait donc pas savoir que ce qu'elle disait pouvait atterrir dans les oreilles d'autres personnes.
Adrien de Steiger, avocat de la policière (cette dernière n'a pas souhaité s'exprimer), s'est dit "soulagé" après l'acquittement de sa cliente. "C'était une très longue procédure qui engage la police. Le contexte était donc tendu. L'affaire a aussi eu un large écho médiatique." La jeune policière recevra 1'000 francs de dédommagement.
Le chef de brigade n'a pas encore décidé s'il allait faire appel. Un appel qui serait accueilli "sereinement" par Adrien de Steiger. Contactée, la police fribourgeoise ne fait aucun commentaire sur cette affaire.



