Frédéric Ducrest se livre: "Je ne regrette rien"
L'ancien directeur du CO de La Tour-de-Trême publie son récit "Tout comme il faut", un an après son renvoi qui a fait trembler le Canton.

Frédéric Ducrest, 58 ans, se définit aujourd’hui comme écrivain après avoir longtemps enseigné dans le canton de Fribourg. Son licenciement, il y a un peu plus d'une année, avait retenti jusqu'au Parlement cantonal, relançant le débat sur l'école. L'affaire soldée par un audit externe sur la gestion du service de l’enseignement a mis en lumière des tensions entre les méthodes prônées par les autorités et les pratiques sur le terrain.
"J’ai toujours essayé de faire tout comme il faut", explique-t-il, exprimant sa frustration de n’avoir reçu aucune véritable raison de fond pour son renvoi. "Tout comme il faut", c'est le titre qu'il a choisi pour son ouvrage, un témoignage raconté "avec les yeux de quelqu’un qui n’a pas vu venir une drôle d’histoire". Il évoque l’autorité du professeur, la place des connaissances ou encore le manque de dialogue entre enseignants et responsables de l’éducation.
Méthodes "datées" sanctionnées
Directeur du Cycle d’Orientation de La Tour-de-Trême pendant vingt ans, Frédéric Ducrest a été épinglé par la Direction de la formation en novembre 2023 pour des pratiques administratives jugées inappropriées, notamment l’usage de la timbreuse et des sanctions financières envers les élèves pour des oublis de clés. La Direction de la formation a aussi considéré que l’ancien directeur du CO avait franchi une limite en informant ses collaborateurs de la demande d’un réexamen d’un avertissement à son encontre.
Contestant cet avertissement, il est remercié avec effet immédiat en janvier 2024. La décision suscite une vague de réactions dans le milieu éducatif et politique. Des députés réclament un audit externe sur la gestion du Service de l’enseignement obligatoire de langue française (SEnOF).
La contestation de son licenciement aboutit devant le Tribunal cantonal, qui en juillet 2024 rejette son recours, estimant que la rupture de confiance avec son employeur était irréversible.
"Pas un règlement de comptes"
Figure respectée par ses collègues, Frédéric Ducrest défend l’importance de l’autorité hiérarchique. "Je parlais de verticalité, c’est-à-dire de hiérarchie entre le professeur et l’élève, et personne ne m’a expliqué pourquoi ce n’était plus acceptable." Il regrette l’absence de véritables débat de fond. Pour lui, l’école s’est considérablement figée et ne soutient plus les approches divergentes. "Des couches supplémentaires de hiérarchie élaborent leurs grandes visions, déconnectées du réel du terrain."
Encore marqué par son renvoi, il explique avoir entrepris une démarche thérapeutique. "Ce livre n’est pas un règlement de comptes, mais j’ai éprouvé le besoin de dire les choses telles que je les ai vécues. C'est avant tout un récit personnel. Aujourd'hui, je tourne la page sans regret. Les motifs de la procédure étaient très discutables, et ma transparence a conduit à mon licenciement. Pourtant, je ne regrette rien, car c’était la posture juste, éthique et respectueuse envers mes collaborateurs."
Le Fribourgeois partage un sentiment mêlé de satisfaction et de préoccupation. "Aujourd’hui, je suis fier du résultat, mais je m’inquiète pour mon avenir professionnel", admet le quinquagénaire. "Au moins, j’espère que l’ouvrage ouvre des débats et suscite des réactions." Le rapport d’audit n’est pas encore terminé. Le Conseil d'État doit répondre d’ici au mois d’avril.