Aveugle, un Broyard se lance à la conquête de Sierre-Zinal

Christophe Rollinet s'est entouré de toute une équipe pour réaliser son nouveau défi: terminer la mythique course des cinq 4000.

Christophe Rollinet (centre) a perdu la vue il y a dix ans. Et pourtant, cela n’a en rien affecté son amour du sport. © Frapp

Le soleil inonde la Broye fribourgeoise en cette fin d’après-midi de jeudi. Christophe Rollinet et son équipe se sont donné rendez-vous chez lui et, surprise, c’est aujourd’hui qu’ils reçoivent leur tenue de course floquée “Équipe Climadjo”, un mélange de leurs prénoms.

Reste encore à s’entraîner un peu avant de réaliser le défi que s’est lancé le Fribourgeois devenu aveugle voilàune dizaine d'années: participer à la mythique course Sierre-Zinal.

D’un refus à la ligne de départ

L’aventure n’a pas été simple à lancer. Après plusieurs refus, les organisateurs de l’événement ont finalement accepté que le cinquantenaire prenne le départ de la course des organisateurs, réservée aux bénévoles, le 23 août prochain. “C’est un défi personnel, mais je souhaite aussi prouver au monde des voyants que si on a un handicap visuel, on peut le faire, et peut-être aussi motiver des personnes qui sont dans la même situation que moi”, se réjouit Christophe, qui est aussi président de la section fribourgeoise de la Fédération suisse des aveugles et malvoyants.

Ce jour-là, l’entraînement est “court et léger”: environ 5 kilomètres avec quelques montées. Christophe est notamment guidé par David Ruchat, son partenaire de course depuis des années. Ensemble, ils ont déjà couru les 10 kilomètres de Payerne, la Course à travers Cugy et d’autres compétitions locales.

Mais Sierre-Zinal, c’est autre chose: 31 kilomètres et près de 2 200 mètres de dénivelé. Pour un tel défi, les deux compères ont dû s’entourer. Tout a donc commencé dans l’épicerie du village, tenue par Claudine. Elle a orienté les deux hommes vers le club de course local, et Malika, Lionel et Jonas ont finalement embarqué dans l’aventure. Ils peuvent même compter sur Nicole, leur masseuse.

Des yeux, des voix et une corde

Un renfort précieux, surtout pour la sécurité. “La fatigue mentale est trop importante et je ne pourrais pas être vigilant tout le temps”, confie David. “Être quatre personnes ne sera pas de trop, car il y a des ravins et des chemins escarpés.” Un trail n’a rien à voir avec une course sur bitume et il faudra donc s’organiser. “Il y aura une personne devant qui anticipe, une autre qui guidera Christophe et deux derrière qui pourraient le rattraper en cas de chute”, précise-t-il.

Les différents membres de l’équipe ont donc appris à guider Christophe. Le principe est simple: il est relié à son guide par une petite corde d’une dizaine de centimètres qu’ils tiennent à la main. “Si on part à droite, il me tire, et si on va à gauche, je sens la corde qui se détend et il me pousse légèrement”, explique Christophe Rollinet. La communication orale est aussi essentielle. Durant tout l’entraînement, David et Malika, les deux guides présents, ne cessent de donner des informations à Christophe: “Une bordure de trottoir dans un, deux, trois… légère montée… décale-toi sur la droite… etc.”

La victoire, c’est d’arriver ensemble

Reste que, malgré la vigilance des guides, des chutes peuvent survenir. “Christophe a déjà ramassé des gamelles”, sourit David. “Lors de notre troisième entraînement, il a pris un trottoir après 50 mètres et s’est écorché le genou. Je lui ai dit qu’on allait rentrer pour le soigner, mais il a refusé et a fait ses 10 kilomètres.” Christophe Rollinet est déterminé à réussir son pari. Il va notamment participer à différents trails d’entraînement. Mais au final, quel est l’objectif de ce Sierre-Zinal ? “L’objectif, c’est que l’on termine tous ensemble et que l’on prenne du plaisir. Il n’y a pas d’objectif de temps”, annonce Christophe, qui, pour la petite histoire, a aussi été capitaine de l’équipe suisse de cécifoot.

RadioFr. / Frapp - Léo Martinetti
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