Fribourg est confronté à une précarité croissante

Le taux de pauvreté, stable de 2,2%, masque les chiffres absolus en hausse, croissance démographique oblige. Une partie de la population exposée ne fait appel à aucun soutien, constate un rapport.

L’indigence désigne un ménage qui n'est pas en mesure de se procurer, par ses propres moyens, les ressources nécessaires à son entretien ou un revenu du ménage, après déduction des cotisations aux assurances sociales et des impôts, inférieur au minimum vital social (image d'illustration). © KEYSTONE/SALVATORE DI NOLFI

"La précarité cachée démontre l'importance d'un suivi régulier de la situation sociale", a relevé vendredi à Fribourg le conseiller d'Etat Philippe Demierre, en charge des affaires sociales. Il s'agit d'adapter les mesures et la nécessaire complémentarité entre associations de soutien aux plus démunis et institutions publiques.

"La pauvreté intègre un déficit dans le logement, la nourriture, la santé, la formation, le travail et les contacts sociaux", a-t-il dit. La référence de 2019 signale que tant le nombre de personnes que le nombre de ménages en situation de pauvreté ont augmenté depuis le précédent rapport, datant en 2016 et comprenant des données de 2011.

Risque imminent

"La pauvreté avance toutefois moins vite que la croissance démographique", a constaté Jean-Claude Simonet, chef de service au Service de l'action sociale. Ainsi, 6'513 personnes (4'056 ménages) sont concernées. Pour plus de 25'000 personnes, soit 8,5% de la population fribourgeoise, le risque de pauvreté est imminent.

La pandémie de Covid-19 et les autres crises, l'énergie et l'inflation, renforcent le phénomène. En 2019, le seuil de risque de pauvreté s'inscrivait à 2'622 francs par mois pour une personne seule. Au-delà, un emploi ne met pas l'abri de la pauvreté ou du risque de pauvreté, a ajouté Jean-Claude Simonet.

Plus de la moitié des Fribourgeois à risque de pauvreté évoluait dans un ménage dans lequel la source de revenus provenait d'une activité professionnelle. La présence d'un enfant dans un ménage constitue toujours un risque plus important pour les mères, celles-ci s'insérant plus difficilement sur le marché du travail.

Situation dissimulée

Le taux de pauvreté est en outre plus élevé chez les femmes que chez les hommes dans la période où les ménages ont des enfants à charge. Les taux s'égalisent par la suite quand les jeunes s'autonomisent. Mais ils se creusent à nouveau à partir de l'âge de la retraite. Le rapport note que la pauvreté s'est accrue pour les plus de 56 ans.

Le document constate encore que la pauvreté demeure une situation dissimulée, avec comme conséquence le non-recours à l'aide sociale. Cet "ultime filet" n'est ainsi pas toujours sollicité, en raison de craintes liées aux permis de séjour, au caractère remboursable de l'aide sociale et à la difficulté des démarches administratives.

Rôle des associations

La pauvreté dissimulée à Fribourg concernait 1'334 personnes, un nombre en hausse. Le rapport relève encore le rôle des associations. Celles-ci viennent soutenir des personnes ou des familles qui évoluent juste au-dessus du seuil de pauvreté, avec une fragilité pouvant surgir face à des dépenses imprévues.

Le phénomène est largement ressorti avec le Covid-19, avec des associations qui, par leur expertise, ont apporté une complémentarité aux institutions publiques. La collaboration entre secteurs public et privé doit par ailleurs être renforcée, a insisté Jean-Claude Simonet. Les "working poor" ont été mentionnés.

La loi sur l'aide sociale sera révisée. Elle passera devant le Grand Conseil dans quelques mois. Le texte, présenté la semaine prochaine, devrait intégrer des nouveaux niveaux d'action évoqués dans le rapport. Comme la question de savoir comment mieux cerner les individus ne recourant pas à l'aide, alors qu'ils y ont droit.

Trois axes stratégiques apparaissent pour la suite: veiller aux évolutions, assurer les liaisons entre la situation de pauvreté et les prestations ainsi que consolider le dispositif actuel de soutien.

ATS
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