Le béton s'invite à BDmania

"J'ai toujours considéré le béton comme une évidence." Alia Bengana a terminé ses études d'architecture il y a une vingtaine d'années. Pendant ce cursus, cette professeure à la Haute école d'architecture de Fribourg n'a jamais remis en question cette matière. Cependant, sa conviction s'est effritée au fil des ans. Elle s'est d'abord intéressée aux labels liés à la construction, mais un événement va tout accélérer.

Il y a plus de 10 ans, Alia Bengana est mandatée pour un projet dans son pays natal, l'Algérie. Ce projet se déroule à Timimoun, dans le désert. Elle souhaite construire en terre, un matériau plus adapté aux conditions du lieu, mais elle se heurte à plusieurs oppositions. "Les gens me disaient que la terre, c'était pour les pauvres et qu'ils voulaient construire en béton." Le problème, c'est que le sable nécessaire à la fabrication du béton vient d'Alger, à 1200 km de là, car celui du désert n'est pas adéquat. "Je suis face à une absurdité," explique Alia Bengana.

Le béton est problématique principalement pour quatre raisons, énumère-t-elle:

• La création de béton émet beaucoup de CO2
• Il faut énormément de sable pour le fabriquer
• Le béton est une matière obsolescente lorsqu'elle est associée à l'acier et exposée aux intempéries et nécessite donc un entretien accru
• Une fois en fin de vie, il devient un déchet

Ces problèmes sont souvent mis de côté au moment de construire. Pour citer la BD: "aujourd'hui, 80 % de ce qui se construit est en béton."

Vulgariser grâce à la BD

Face à ce constat, cette franco-algérienne s'associe à son mari, le journaliste Claude Baechtold, pour publier une série d'articles en 2021 sur la surutilisation du béton. Une série publiée dans le média suisse Heidi.News. Ces articles seront ensuite adaptés en bande dessinée grâce au coup de crayon d'Antoine Maréchal. "J'ai eu envie d'écrire pour vulgariser et ne pas seulement m'adresser aux architectes," explique Alia Bengana. La BD Béton, enquête en sables mouvants est alors née.

Cet ouvrage évoque l'arrivée d'Alia Bengana dans le désert algérien, l'influence de l'architecte franco-suisse Le Corbusier. Mais aussi les foreuses qui viennent extraire du sable devant sa résidence vaudoise, la lutte entre les géants de la construction, ou encore les alternatives au béton comme le bois, la paille, la pierre ou la terre. "Il faut considérer le béton comme une matière précieuse et l'utiliser avec parcimonie," ajoute la co-autrice.

Alia Bengana, Antoine Maréchal et l'association "Les architectes pour le climat" seront présents samedi à Belfaux à l'occasion du festival de bandes dessinées BDmania. Une séance de dédicaces ainsi qu'une conférence (14h) sur le sujet sont au programme.