Chiffres et éthique: où en est l'expérimentation animale?
Une action contre cette pratique a lieu ce samedi à Fribourg, dans un contexte qui vise à optimiser l'expérimentation animale.
Chaque année, plus d'un demi-million d'animaux sont utilisés dans la recherche en Suisse. C'est quatre fois moins que dans les années 1980, mais ce chiffre reste inacceptable aux yeux des associations de défense des animaux, qui organisent ce samedi à Fribourg une grande mobilisation pour demander au gouvernement suisse de trouver des alternatives viables à l'expérimentation animale. Des discours de personnalités publiques et des stands d'information animeront la place Python. L'action sera ensuite marquée par une marche protestataire et un happening devant l'Université de Fribourg.
A Fribourg, l'université renferme des singes, des rongeurs, des musaraignes et même des poissons. Une quinzaine de primates, par exemple, sont utilisés dans le domaine des neurosciences, pour la recherche de traitements possibles de maladies telles que les accidents vasculaires cérébraux et les lésions de la moelle épinière, mais aussi pour le développement de prothèses visuelles et acoustiques.
Selon un rapport sur l'année 2022, la plupart des expériences impliquaient des "blessures légères ou de courte durée", comme des prises de sang répétées sur 24 heures. A l'autre bout du spectre, les interventions chirurgicales, les blessures prolongées voire des manipulations qui causent, in fine, la mort de l'animal sont classées au plus haut niveau de contrainte (7% à Fribourg en 2022).
Certains projets de recherche ont débouché sur des essais cliniques chez l'homme. D'autres ont été substitués. Par exemple, par le développement de modèles de culture cellulaire 3D pour diminuer les expériences sur les souris, qui restent les cobayes par excellence, en particulier pour la recherche sur le cancer et les maladies neurodégénératives.
Pour la Ligue Suisse contre l'expérimentation animale et pour les droits des animaux (LSCV), la sortie progressive de l'expérimentation animale dépend du développement de ce type de démarche alternative. "Selon des estimations, si ces méthodes étaient pleinement appliquées, elles pourraient remplacer jusqu'à 80% des expériences menées aujourd'hui", souligne Athénaïs Python, membre de l'organisation. Selon elle, davantage de moyens financiers et un changement de culture complèteraient cette transition.
Vers une diminution
La loi suisse sur la protection des animaux se veut particulièrement stricte. Les chercheurs sont tenus de limiter au maximum le recours aux expérimentations, qui ne sont admises que s'il n'existe pas d'autre moyen. Leurs demandes d'autorisation sont systématiquement soumises à une commission cantonale et à la Confédération. Le principe éthique des 3R (pour replace, reduce, refine) guide les pratiques.
La Confédération a également lancé en 2021 un programme de recherche qui encourage l'innovation sans le recours aux animaux. Doté de 20 millions de francs, il s'étend sur une durée de cinq ans. Un plan qui ne convainc pas la LSCV. "L'innovation dans le domaine des 3R n'entraîne pas une diminution globale des expériences sur les animaux, les plus contraignantes sont même en augmentation."
Marius Widmer, porte-parole de l'Université de Fribourg, rappelle que les tests sur les bêtes sont les standards exigés pour la recherche fondamentale, les vaccins et les médicaments. Interdire totalement ces gestes aurait non seulement un effet néfaste sur la santé humaine, mais cela risquerait en plus de les délocaliser à l'étranger, dans des pays moins soucieux du bien-être animal.