Les skyblogs disparaissent à tout jamais

Les plus âgés ne savent peut-être pas de quoi je parle. Les plus jeunes non plus, d'ailleurs. Je suis de cette génération d’entre-deux, celle qui a connu les skyblogs. Une révolution à l’époque, au début des années 2000: c'était l’un des premiers réseaux sociaux hyper à la mode.

Chacun avait son pseudo, avec son blog qui fonctionnait comme un journal intime à la vue de tous, pour partager des états d’âmes, des textes, des créations personnelles ou des mots empruntés à de vrais auteurs. On y faisait des déclarations d’amitié ou d’amour enflammées.

Il y avait certains codes à respecter, comme l'utilisation d'un langage SMS, aujourd'hui douloureux pour les yeux, ou des polices d’écritures plus créatives, avec des zéro à la place des "O", par exemple. On incrustait aussi des images animées, les premiers GIF, fais avec le programme GIMP.

Tout ça était fait dans le but d’attirer l’attention des visiteurs de passages et obtenir le Graal: finir le premier à la course aux commentaires. On s’en fichait de leur qualité, il fallait juste en avoir un maximum. C'était un symbole de réussite.

Le summum du superficiel

La jeune fille de 14 ans que j’étais à l’époque, en 2006, était torturée et influençable. Elle voulait entrer dans le moule, faire ce que tout le monde faisait, tout en essayant de se démarquer.

C’est mon blog qui me l’a rappelé, il y a quelques jours, après avoir retrouvé ses accès. Quelques clics pour retomber sur les méandres de mon adolescence, 256 articles de blogs retraçant trois ans de ma vie, ses hauts, ses bas, ses questionnements et ses certitudes. Certains articles ont été modifiés, en fonction de mes états d’âme. D’autres ont été masqués, car ils ne reflétaient plus celle que j’étais.

Mon blog est un peu comme une capsule temporelle qui me replonge 17 ans en arrière. Un vieux journal intime que l'on dépoussière et qui nous rappelle que le temps est passé. Il nous montre aussi notre évolution (et pas que capillaire) et nous fait prendre conscience qu’on a grandi, qu’on a pris du recul.

Depuis, je suis devenue adulte, j'ai franchi la barre de la trentaine et j’ai fondé une famille. J’ai oublié aussi ce par quoi je suis passée, alors que bien souvent, les jeunes de maintenant me laissent perplexe. Notamment par rapport à leur surexposition et leur surutilisation des réseaux sociaux et sur ce qu’ils sont parfois prêts à faire pour être appréciés. J’ai l’impression qu’il y a un gouffre entre eux et moi, un choc des générations.

Mais j’ai simplement oublié. Grâce à mon skyblog, je me rends compte finalement que j’étais la même, simplement à une époque différente. Merci MissLauriane901 de m’avoir rappelé à l’ordre.

Si vous avez un skyblog, vous pouvez encore le télécharger sur votre ordinateur jusqu'au 21 août. Les explications sont disponibles sur le blog de Skyrock.

Après cette date, seuls les visiteurs des archives nationales françaises auront accès à ces publications, qualifiées de "trésor sociologique" par Skyrock. Ils seront anonymisés.