Les plantes envahissantes prolifèrent aussi à Fribourg
Les néophytes envahissantes pullulent un peu partout en Suisse. Petit tour d'horizon de la situation dans le canton de Fribourg.
En Basse-Ville de Fribourg, le long du Gottéron, il est impossible de ne pas remarquer les plantes néophytes une fois que l'on sait les reconnaître. Elles abondent sur les berges du cours d'eau. Cet endroit, Joseph Volery, biologiste au Service des forêts et de la nature du canton de Fribourg (SEN) et spécialisé dans les néophytes envahissantes, le connaît bien.
Au bord de la rivière, le biologiste désigne un haut arbuste aux longues inflorescences violettes. "C'est un arbre aux papillons, originaire de Chine. Il a été introduit en Europe pour ses qualités ornementales", explique-t-il. "Il y a une vingtaine d'années, on recommandait de le planter parce qu'on pensait qu'il attirait les papillons."
Mais l'arbuste est désormais considéré comme envahissant en Suisse, en Belgique et en France. Produisant plus d'un million de graines par inflorescence, il se multiplie rapidement, prenant la place d'autres plantes cruciales pour la survie d'insectes indigènes, un vrai problème pour la biodiversité.
Une flore en compétition
On appelle plantes néophytes les espèces importées d'autres régions du monde par l'humain dès le début du 16e siècle. Elles peuvent avoir été introduites pour leur beauté ou simplement par erreur, en raison par exemple du commerce international. Lorsqu'elles sont considérées comme envahissantes, cela signifie qu'elles s'adaptent particulièrement bien à l'environnement local, se reproduisent rapidement et entrent en compétition avec la flore indigène. Elles posent alors un problème pour l'économie de la région, l'agriculture ou la santé de la population.
L'Impatiente glanduleuse, appelée aussi Balsamine de l'Himalaya, avec ses belles et grandes fleurs roses, est l'une d'entre elles. Tout comme l'arbre aux papillons, elle a été importée pour des raisons ornementales. Et si elle ne produit pas autant de graines, elle est capable d'expulser les siennes sur plusieurs mètres, facilitant sa propagation.
"Elle étouffe la végétation des bords de ruisseaux", déplore Joseph Volery. Plusieurs Impatientes sont justement visibles le long du Gottéron. "C'est une plante annuelle, elle meurt en automne, ne laissant aucune racine, ce qui rend les berges bien plus vulnérables à l'érosion." Les néophytes n'impactent donc pas que la biodiversité, mais aussi l'environnement en général.
Parfois toxiques
L'Office fédéral de l'environnement a défini il y a deux ans une liste de 100 espèces envahissantes. "Sur Fribourg, on en retrouve un peu plus de la moitié", relate le biologiste fribourgeois. "La plupart ne sont pas problématiques, car encore très localisées et donc faciles à gérer. Mais une quinzaine d'entre elles se sont répandues rapidement et nous n'avons pas réussi à lutter au bon moment. Elles peuvent maintenant montrer leur potentiel le plus destructeur."
Et parmi celles-ci, le séneçon du Cap est probablement l'une des espèces les plus problématiques. Cette plante à l'inflorescence jaune, originaire d'Afrique du Sud, a été importée certainement par erreur avec le commerce de la laine. Elle pousse généralement sur les bords des routes, mais on peut aussi la retrouver dans nos champs. Et c'est là qu'elle fait le plus de dégâts, car elle est toxique pour le bétail. "Nous n'en avons heureusement pas encore beaucoup dans notre canton", rassure Joseph Volery.
Une lutte complexe
Pour éviter que toutes ces espèces foisonnent dans notre environnement, il faut lutter contre elles. Et il existe pour cela plusieurs moyens.
Premièrement, l'interdiction de vente. "Il y a deux grands pôles d'importation pour les plantes néophytes en Suisse: l'Amérique du Nord et l'Asie, vers la Chine et l'Himalaya", explique Joseph Volery. "Des régions avec lesquelles on commerce beaucoup et qui ont des climats plus ou moins similaires." Dès le 1er septembre, une cinquantaine de plantes néophytes seront interdites. C'est le cas de l'arbre aux papillons, par exemple.
Quant aux espèces importées involontairement, et celles qui sont déjà bien présentes chez nous, la meilleure solution reste de les arracher. Actuellement, l'agriculture, le SEN ainsi que les parcs naturels régionaux luttent activement contre la prolifération des plantes envahissantes. Au niveau du canton, une stratégie est en cours de développement pour définir comment mieux répartir cette lutte entre ces différents acteurs.
Et comment la population peut-elle agir de son côté? "Le premier conseil que je peux donner est de connaître ces néophytes envahissantes", répond Joseph Volery. "Il existe beaucoup de documentation en ligne et d'applications pour les téléphones qui permettent de les reconnaître. Et si vous n'arrivez pas à arracher celles que vous voyez, alors vous pouvez transmettre l'information." Il existe pour cela un site spécialisé dans la cartographie de la flore suisse: Info Flora et son application InvasivApp.