Crack à Lausanne: "Refuser des gens est un problème"
Dès 2026, Lausanne limite l'accès à ses salles de consommation aux habitants du canton de Vaud. Une décision qui aura un impact à Fribourg.

Depuis plusieurs mois, les commerçants et riverains de la place de la Riponne, à Lausanne, demande à la commune de prendre des mesures contre les problèmes liés à l'Espace de consommation sécurisé (ECS), qui a ouvert ses portes en mai 2024. La montée de la consommation de crack dans la capitale vaudoise a engendré une hausse de la violence et de l'insécurité.
Mardi, les autorités ont annoncé une série de mesures, qui seront mises en place entre ces prochains jours et début 2026, pour combattre ces problèmes. En plus d'une présence policière 24h/24h dans le secteur, la ville a décidé entre autres de fermer les portes de l'ECS aux personnes qui résident en dehors du canton de Vaud.
"Nous sommes bien conscients que ces personnes doivent être aidés, mais ce n'est pas à la ville de Lausanne de le faire", justifie Pierre-Antoine Hildbrand, Municipal en charge de la sécurité. "On ne peut pas accueillir des personnes souffrant d'addiction de toute la Suisse romande, ce n'est pas correct vis-à-vis de notre population."
Actuellement, un utilisateur sur quatre de l'ECS provient d'un autre canton.
Un impact jusqu'à Fribourg
À Fribourg, un ECS géré par la fondation Le Tremplin a également vu le jour en août 2024. Depuis qu'il a appris la décision de Lausanne, Sébastien Evéquoz, responsable du Seuil (l'accueil de jour de la fondation), s'inquiète des conséquences que cela aura sur la fréquentation. "Les gens vont aller soit vers Genève, soit vers Fribourg et nous sommes les plus proches."
Étant encore en phase de test, le local de consommation de Fribourg est soumis à des limitations sur les personnes qu'il peut recevoir. L'un des critères est notamment d'habiter dans le canton, tout comme cela sera imposé à Lausanne. Les utilisateurs déboutés en terres vaudoises ne pourront donc pas se rabattre sur cet espace. "On a très peur que la consommation se répercute sur la rue", commente le responsable.
À l'heure actuelle, le local enregistre environ 200 utilisateurs réguliers, pour 30 à 40 actes d'utilisation par jour en moyenne. Depuis son ouverture, il a dû refuser au total une vingtaine de personnes sur la base de leur lieu de résidence. Un chiffre qui risque donc d'augmenter à partir de l'année prochaine, ce qui ne réjouit par Sébastien Evéquoz.
"Le simple fait de dire non à quelqu'un qui veut consommer dans un centre sécurisé plutôt que de le faire dans la rue est un problème", développe le chef de projet. "Cette personne est dans une attitude bonne et si on lui dit non, elle devra adopter de mauvais comportements."
Pour le responsable du Seuil, il a donc un vrai risque d'aggraver la situation en limitant l'accès à des locaux dédiés à la consommation. "On oublie un peu la substance à la mode, qui fait qu'on ne doit pas réagir de la même manière que si on parlait de fumeurs de joints. Le crack, vous n'arrêtez pas comme ça. Ces gens ne vont pas s'arrêter de consommer, qu'ils aient un endroit pour ça ou non."
À l'inverse, obliger les personnes dépendantes à passer par une procédure pour accéder à un espace de consommation a des effets bénéfiques. "Ils doivent s'inscrire et vont donc beaucoup plus calibrer leur consommation", précise Sébastien Evéquoz. "Nous, cela semble profitable à tous les étages. On n'a jamais fait une aussi bonne réduction des risques que depuis qu'on a cet outil-là."
Contactée, la police cantonale de Fribourg fait le point sur la situation. "La consommation de cocaïne et de crack en particulier, a connu une augmentation. A l’heure actuelle, nous pouvons dire que le phénomène n’a pas atteint des proportions comme dans certaines grandes villes suisses. Nous avons peu de problèmes annoncés liés à l’insécurité du citoyen en lien avec le milieu toxicomane."



