Un Romand à la tête des Familles arc-en-ciel

Thomas Méchineau est le nouveau directeur de l'association de défense des familles LGBTQI, bien présentes en Suisse, mais peu visibles

Le Lausannois Thomas Méchineau est diplômé de l'EPFL et enseignant © Thomas Méchineau

Thomas Méchineau nous reçoit dans son appartement d'un vieil immeuble de Lausanne. Des petites pièces bien remplies. Normal quand on est une famille de 4 personnes, dont deux enfants en bas âge. Ses enfants, justement, jouent tranquillement dans leur chambre avec celui qui les a porté dans son ventre. Un homme transgenre, époux du nouveau directeur général de l'Association des Familles arc-en-ciel suisses.

De parents français, mais Lausannois de naissance, Thomas Méchineau, 35 ans, a fait son coming out à l'adolescence. Il n'a pas attendu beaucoup plus longtemps pour s'engager dans la défense des droits des personnes LGBTQIA+. Pour son travail de maturité, il a recueilli des témoignages de jeunes qui, eux aussi, se sentaient différents. Diplômé en informatique à l'EPFL, il prend la voie de l'enseignement il y a une dizaine d'années. Avec le souci de toujours tenir un discours inclusif, non seulement à l'égard des personnes LGBTQIA+, mais aussi des autres minorités. "Sans faire de prosélytisme", tient-il à souligner.

On leur a expliqué que des schémas familiaux, il y en a plein!

Quand il rencontre celui qui va devenir son mari, Thomas Méchineau parle rapidement de son souhait de fonder une famille. "Pour tout vous dire, au premier rendez-vous", glisse-t-il en souriant. Le couple a d'abord accueilli il y a 4 ans une petite fille et étonné par la même occasion le personnel soignant du CHUV qui n'avait jamais eu à s'occuper d'une grossesse menée par un homme trans. Puis un petit garçon est venu compléter le tableau il y a deux ans. "Nous avons toujours été très clairs avec nos enfants, souligne le trentenaire, on leur a expliqué que des schémas familiaux, il y en a plein!"

Une réalité difficile à chiffrer

30'000, c'est le nombre d'enfants issus de familles dites arc-en-ciel (c'est-à-dire avec au moins un parent homosexuel, bisexuel, transgenre ou queer) dénombrés en 2021. Un chiffre certainement inférieur à la réalité, en raison notamment du silence qui entoure encore cette réalité. Les personnes concernées préfèrent rester discrètes pour éviter d'être affichées. Et puis, le mariage civil pour toutes et tous est entré en vigueur il y a tout juste un an. Cette nouvelle disposition pourrait bien faire évoluer les chiffres à la hausse.

D'où l'importance, pour Thomas Méchineau, de parler et de rendre plus visibles ces familles qui diffèrent d'une configuration disons classique. Particulièrement en formant les enseignants à cette réalité. Comment intégrer des enfants issus de familles arc-en-ciel dans leur classe? Comment expliquer la situation aux élèves? Comment désamorcer aussi les éventuels malentendus? Les membres de l'association vont déjà dans les écoles pour faire ce travail de communication.

On en parle de plus en plus mais on diabolise.

"On concentre sur le LGB et pas encore assez sur le T." Parmi les priorités du nouveau directeur, éclaircir et renforcer le statut juridique des parents transgenres. Mais, on manque encore de recul et de données sur la question, même si l'on parle davantage de la transidentité, dans les médias notamment. "On en parle de plus en plus, mais on diabolise aussi!" L'acquisition de nouveaux droits suscite souvent des critiques.

Un monde dans lequel les questions de genre, de transidentité, d'orientation sexuelle ne feraient plus débat, ce n'est pas pour tout de suite, Thomas Méchineau en est bien conscient. Lui croit beaucoup à la force de la pop culture. Il y a actuellement quantité de films, dessins animés ou autres mettant en avant des personnes LGBTQIA+. De quoi montrer aux plus jeunes qu'il y a différents modèles de familles et que c'est normal.

RadioFr. - Sarah Camporini
...