Festivals: l'équation difficile des cachets d’artistes
Les festivals fribourgeois jonglent avec des budgets serrés pour faire venir des têtes d'affiche qui peuvent coûter plusieurs dizaines de milliers de francs par concert.

La programmation d'un festival de musique peut être un véritable casse-tête pour les organisateurs. Les cachets des têtes d'affiche internationales, qui atteignent rapidement des dizaines de milliers de francs, peuvent mettre sous pression des budgets déjà fragiles. Cette situation crée un fossé avec les artistes de la région, dont la rémunération et la visibilité sont souvent moindres.
Mais pour attirer un public et vendre des billets, les festivals, comme Les Georges à Fribourg, dépendent de ces têtes d'affiche. "Pour remplir des salles, des clubs et des festivals en Suisse, il faut quand même beaucoup se tourner vers l'étranger, beaucoup vers la France", explique Xavier Meyer, son directeur.
Le nombre de talents helvétiques capables de demander des sommes plus importantes, comme Sophie Hunger, Stress ou Stephan Eicher, par exemple, reste limité. Le fossé se creuse entre des stars dont la valeur peut monter "très vite en quelques semaines" et des artistes locaux ou émergents dont les cachets "n'ont pas tellement augmenté", analyse Xavier Meyer.
Ce problème ne touche pas que les festivals payants, même pour des évènements gratuits et plus petits, comme le Festi'Cheyres, la situation est similaire. "Des fois, tu tâtes le terrain sur de grosses têtes d'affiche, tu as l'impression qu'elles sont encore accessibles et on te demande 20’000 francs", confie Joël Grub, le programmateur du festival. "Là, directement, ça nous fait hisser les poils sur la nuque."
Face à ces contraintes, Festi'Cheyres a fait un choix radical cette année: une programmation 100% suisse. Le festival, qui a connu des difficultés financières après de fortes pluies l'an dernier, propose des cachets allant de 300 à 2’500 francs. Du côté des Georges, les cachets pour les artistes émergents et locaux vont de 1'000 à 5'000 francs.
Reconnaissance pour les artistes suisses
Du côté des artistes, la réalité est parfois aussi amère. Même en jouant dans de grands festivals, la reconnaissance n'est pas toujours au rendez-vous, comme l'explique Grégoire Pasquier, producteur et compositeur pour le projet fribourgeois Shuttle, qui jouera cet été notamment à Festi'Cheyres ou encore au Montreux Jazz. "Des fois, vous avez l'impression que c'est une aubaine, vous allez jouer dans un festival comme le Paléo, et puis en fait, il faut jouer à 14 heures. Ce n'est pas le bon moment." Il ajoute que les groupes suisses ne sont pas toujours "mis en valeur" dans les plus grands événements.
Pour celles et ceux qui veulent se professionnaliser, il peut être difficile de rentrer dans ses frais. "Je m'entoure de musiciens dont c'est le métier", explique Grégoire Pasquier, "donc il faut que je les paye." Il admet faire certaines dates à perte. "Je vais compenser ce que je n'ai pas en cachet pour pouvoir payer mes musiciens."
Une expérience qu'il ne vit cependant pas dans des festivals plus locaux, qui paient généralement aussi bien, voire mieux que certains grands évènements. "Il y a vraiment la volonté de mettre en avant les artistes fribourgeois", explique-t-il. "Quand on joue dans un festival de la région, on est quand même assez privilégiés. On est toujours bien accueillis, les gens font tout pour que le concert se passe bien. Il faut aussi voir les choses du bon côté."