Primes: "Les lobbies agissent avec force sur le Parlement"

Comment soulager la charge des primes maladie? Interview de Simon Zurich, vice-président de la Fédération romande des patients.

Les primes maladie augmenteront de 7% en moyenne pour la population fribourgeoise en 2025. © KEYSTONE

Radio Fribourg: Simon Zurich, vous êtes député socialiste au Grand Conseil, mais surtout vice-président de la Fédération des patients de Suisse romande. Chaque année, les primes maladie augmentent. Pour 2025, ce sera 7% de plus dans le canton de Fribourg. Qu'est-ce qui peut stopper cette augmentation des coûts?

Simon Zurich: Rien ne la stoppera si le Parlement fédéral ne prend pas des mesures fermes, notamment pour diminuer le prix des médicaments et pour mieux répartir les coûts, en l'occurrence moins de coûts pour la médecine spécialisée et plus d'investissements pour la médecine de premier recours. Aujourd'hui, nous n'avons pas suffisamment de médecins généralistes, pas suffisamment de pédiatres et de psychiatres. Cela mène à un report important sur les urgences. On attend des mesures qui peuvent améliorer la qualité du système de santé, mais aussi freiner la hausse des coûts.

Cela fait des années que l'on dit que cette médecine de premier recours est une priorité. Qu'est-ce qui bloque?

Les lobbies agissent avec une force incroyable sur le Parlement. Toutes les mesures pertinentes proposées par le Conseil fédéral ces dernières années ont échoué. Le Conseil national a par exemple refusé une meilleure coordination des soins, alors qu'on sait que c'est une mesure essentielle. Des personnes avec des maladies chroniques sont renvoyées d'un médecin à l'autre sans coordination, pour des coûts inutiles et une mauvaise prise en charge. On a besoin de cette meilleure coordination, et pourtant, la proposition du Conseil fédéral est refusée alors qu'elle fait sens. Pourquoi? Parce que les lobbies bloquent le Parlement fédéral. Et ça en devient tout bonnement désespérant.

Les lobbies sont si puissants, d'après vous?

Oui. Il y a eu des mesures pertinentes sur la table et finalement, les seules qui passent sont celles qui impliquent un report de coûts sur les patientes et les patients. Encore jeudi, le Conseil des États a décidé d'augmenter la franchise minimale. Qu'est-ce que ça veut dire? Que vous allez devoir payer 200 francs en plus avant d'aller chez le médecin. C'est tout simplement inacceptable, vu la charge qui pèse déjà sur les patients et les patientes.

Dans notre canton, on voit que les coûts de la santé augmentent. Selon le conseiller d'État en charge de la santé Philippe Demierre, la hausse est de 3,2% sur un an, mais les primes, elles, grimpent de 7%. D'où vient cet écart?

Une partie importante de cette hausse est due à un effet de rattrapage. L'année passée, on a eu beaucoup de changements d'assurance. Par un défaut du système, quand c'est le cas, les assureurs ne calculent pas bien leurs primes et cela se reporte. Donc si on suit le jeu en se disant que l'on va payer moins en changeant, eh bien à long terme, cela a un effet négatif (ndlr: parce que les assurances reconstituent leurs réserves). On est vraiment dans un cercle infernal. Au niveau suisse, environ 10% de la hausse est due à ces changements d'assurance trop nombreux. Cela représente près de 200 millions de francs gaspillés pour la population fribourgeoise. Il y a une seule solution: avoir une caisse d'assurance maladie unique.

Une proposition déjà faite notamment par les socialistes a été refusée deux fois, en 2007 et en 2014. Pourquoi cette caisse unique aurait, cette fois, une chance de passer?

Lors du dernier refus, les cantons romands avaient déjà fortement soutenu cette idée, parce que nous avions les primes les plus chères. Aujourd'hui, beaucoup de cantons alémaniques ont vu leurs primes augmenter également. Ils voient enfin les problèmes que nous vivons depuis des années. Et si une solution n'est pas possible au niveau fédéral, je pense qu'il sera nécessaire d'agir au niveau cantonal et de prévoir une caisse unique dans le canton de Fribourg.

Ecouter l'interview complète:

RadioFr. - Maëlle Robert / Adaptation web: Mattia Pillonel
...