Dermatose bovine: "La situation est tendue autour de nous"

Cette maladie mortelle pour les vaches est aux portes de Genève. Le vétérinaire cantonal fribourgeois Grégoire Seitert fait le point.

Le vétérinaire cantonal Grégoire Seitert incite à la vigilance, à l'heure où Genève, Vaud et le Valais vaccinent les vaches. © KEYSTONE

Les services vétérinaires sont sur le qui-vive. Une épidémie inédite de dermatose nodulaire contagieuse frappe les vaches en France voisine, où une vingtaine de foyers ont été recensés depuis juin en Savoie. Des centaines de bêtes ont déjà été abattues. Cette épizootie hautement contagieuse n'est jamais apparue en Suisse, et la dernière fois en Europe en 2015.

En Suisse, les troupeaux du canton de Genève et dans le district de Nyon doivent obligatoirement être vaccinés. Ce vendredi, le Valais a annoncé la même mesure pour des régions frontalières, afin de lutter contre la propagation de cette maladie virale qui se transmet par des insectes, et qui peut être mortelle pour les bovins.

La dermatose bovine cause des lésions cutanées et de la fièvre. Greek Veterinary Authorities - Lina Karagianni

A noter qu'elle ne se transmet pas à l'homme depuis l'animal. "La consommation de produits issus d'animaux infectés ou vaccinés ne présente aucun risque pour la santé humaine", notent les autorités fédérales, qui ont autorisé l'utilisation de vaccins, au vu de la situation.

Radio Fribourg: Grégoire Seitert, vous êtes le chef du Service de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires du canton de Fribourg. Quelles sont les conséquences de cette épizootie pour les agriculteurs fribourgeois?

Fribourg ne compte actuellement pas de foyer d'infection et ne se trouve pas dans la zone de surveillance. Il n'y a pas de conséquences à ce stade. Les vétérinaires ont été sensibilisés et il y a une possibilité en cas de doute ou de suspicion de faire un diagnostic d'exclusion. L'agriculteur peut prendre des mesures pour protéger autant que possible ses vaches des insectes piqueurs sur son exploitation.


Dans quel état d'esprit se trouvent les agriculteurs?

Ils sont inquiets. La situation est assez tendue autour de la Suisse. D'abord, ça a commencé avec la langue bleue l'année passée, où on a fait une grande campagne de vaccination. Mais en parallèle, nos pays limitrophes européens comptent deux épizooties hautement contagieuses, en plus de la dermatose nodulaire contagieuse. D'abord, la peste porcine africaine au sud de l'Allemagne et au nord de l'Italie. Ensuite, la fièvre aphteuse qui a commencé en Allemagne avant de s'étendre à l'est. 

Avez-vous déjà connu une telle situation sur le front des épizooties à nos frontières?

La dernière maladie hautement contagieuse, c'était la fièvre aphteuse dans le canton de Fribourg, en Gruyère en 1963 et le nord de la Sarine, la Singine et le Lac en 1964 et 1965. Je ne parlerai pas encore de situation particulière ou extraordinaire, mais c'est clair que c'est une situation de vigilance où on a besoin de tous les partenaires. Les exploitations agricoles ont bien compris les enjeux. 

Pourquoi existe-t-il autant de fronts à lutter maintenant?

Le marché est beaucoup plus globalisé, avec plus de mouvements et plus de volumes qui circulent. Cela ne concerne pas seulement les animaux, mais des marchandises, des denrées, des sous-produits. On constate une autre composante, en tout cas pour la langue bleue et la dermatite nodulaire contagieuse: un insecte piqueur joue un rôle. Et ces insectes piqueurs, malheureusement, avec le réchauffement climatique, deviennent toujours plus actifs.

Ces maladies font peur. Que faut-il dire à la population ?

D'abord, qu'il n'y a aucun risque de transmission à l'humain. Par contre, il y a des impacts économiques sévères. Par exemple, ne plus pouvoir exporter notamment des produits fromagés, du lait, du lait en poudre, du chocolat. Si on prend d'autres animaux comme les porcs, on pourrait avoir des risques de ne plus pouvoir exporter des valves cardiaques. Tout ceci toucherait aussi la population avec des prix sur les marchandises qui prendraient l'ascenseur.

A quoi doit-on faire attention en tant que citoyen?

Ne pas ramener des aliments ou des produits de l'étranger en Suisse, comme du fromage ou du saucisson. 

RadioFr. - Vincent Dousse / Adaptation web: Alexia Nichele
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