Vin sans alcool: "Ça dénature encore trop le produit"
Les vignerons du Vully s'intéressent à la désalcoolisation du vin, bien qu'ils ne souhaitent pas l'adopter en raison de son coût élevé, peu adapté à un marché de niche.
Produire du vin sans alcool, ce n'est pas encore pour tout de suite dans le Vully. Les raisons invoquées? Les techniques de production sont coûteuses et mieux adaptées aux grosses structures. Pour l'instant, la demande est faible dans la région, voire anecdotique. En plus de cela, les vignerons du Vully ont très peu de stock, car ils n'ont pas de peine à vendre leur vin, surtout du côté de la suisse-allemande. Donc difficile de garder quelques litres, pour produire du vin 0%.
Pour toutes ces raisons, la plupart des vignerons du Vully n'ont pas d'intérêt à produire du vin sans alcool. Mais ils s'intéressent à ce marché de niche. Surtout que la consommation d'alcool est en baisse en Suisse. Marylène Bovard est oenologue à la Cave du Château de Praz: "C'est une thématique qui nous concerne. Mais pour nous petits producteurs, s'intéresser à un produit de niche, c'est compliqué, parce qu'il faut le savoir-faire et les équipements nécessaires. A-t-on vraiment intérêt à se lancer là-dedans pour de toutes petites quantités?". La réponse est non. Pour l'instant.
Une technique trop invasive
D'autant que le processus de fermentation pour fabriquer du vin sans alcool, est le même que pour le traditionnel, c'est seulement à la fin que l'alcool est retiré. L'une des techniques s'appelle l'osmose inverse. Les détails avec Fiona Stucki, jeune ingénieure-oenologue à la Cave aux hirondelles à Praz:
Selon l'ordonnance sur les boissons alcoolisées, l'appellation "vin" peut uniquement être donnée à un produit dont la teneur minimale en alcool est de 8,5%. Début novembre, un oenologue valaisan et un encaveur vaudois ont réussi à créer le premier vin désalcoolisé entièrement suisse. Mais on en est au balbutiement de cette technique en Suisse romande. Les deux Fribourgeoises suivront d'ailleurs vendredi un atelier sur ce sujet organisé par l'Union suisse des oenologues à la Cave de la Côte.
Une dégustation s'impose
Les deux vigneronnes ont d'ailleurs déjà goûté un verre de vin sans alcool. Si Fiona Stucki trouve cela "pas mauvais" même si elle n'a pas l'impression de boire du vin, Marylène Bovard n'a pas été "subjuguée". Elle se dit assez sceptique quant à l'équilibre de ce vin. Toutes les deux préféreraient boire un jus d'orange ou une limonade pour un apéritif sans alcool. Mais elles comprennent que des personnes souhaitent trinquer avec les autres dans des verres à pieds, pour ne pas se sentir exclues.
Est-ce que cette sorte de vin meilleur pour la santé suivra la même tendance que les bières sans alcool? L'avenir nous le dira. La demande pour les bières blondes, blanches ou brunes 0% est en forte hausse. En 2024, elles représentaient 7% des parts du marché en Suisse. Fiona Stucki analyse: " Les brasseurs ont droit de rajouter des arômes comme des fruits rouges ou du jasmin par exemple. Tandis que dans le vin, on ne peut rien rajouter. Il est donc plus difficile d'offrir une variété comparé à la bière. Mais je ne serais pas étonnée que ça se développe un jour."