"On a l'impression de devoir pallier les carences de l'Etat"

Jamais l'association des Cartons du Coeur n'avait aidé autant de personnes. La barre des 10'000 bénéficiaires a été franchie l'an dernier.

L'association des Cartons du Coeur a tenu son assemblée générale mardi. © KEYSTONE

Les chiffres ne mentent jamais. Et ceux-là décrivent une réalité méconnue qui fait froid dans le dos. Un peu plus de 6000 personnes bénéficiaient des Cartons du Coeur en 2018. Quatre ans plus tard, la barre des 10'000 bénéficiaires est franchie. 

"Ces chiffres nous inquiètent, commente Benoît Sansonnens, président des Cartons du Coeur Fribourg. On pouvait imaginer que c'était normal durant la pandémie de Covid, mais maintenant cette tendance à la hausse se confirme. Le chômage est bas, mais on constate qu'on a des problèmes de revenus, il y a beaucoup de travailleurs pauvres. Les gens qui viennent chez nous travaillent, mais n'arrivent pas à joindre les deux bouts." 

À ces personnes, il faut encore ajouter un nombre élevé de réfugiés ukrainiens arrivés l'année passée en Suisse. "Ils bénéficient déjà d'aides cantonales, mais c'est sûr que ce n'est pas extraordinaire", concède Jean-Claude Simonet, chef du service de l'action sociale du canton de Fribourg.  

Des dons en baisse 

Les premières constatations des cinq premiers mois de 2023 ne laissent rien présager de bon. Le phénomène se confirme, la demande auprès des Cartons du Coeur est en hausse de près d'un tiers par rapport à la même période en 2022. 

En parallèle, les dons diminuent. "Il y a eu une énorme solidarité durant la crise du Covid, mais maintenant on voit certaines sources de dons diminuer", explique Benoît Sansonnens. L'association boucle, elle, l'année 2022 sur un déficit de 35'000 francs. 

Bientôt le bout du tunnel pour la banque alimentaire?

La solution à cette précarité qui se renforce? Dans le canton de Fribourg, elle se nomme "banque alimentaire". Lancé il y a deux ans, le projet, qui veut récupérer et redistribuer les invendus des grandes surface, piétine.

"On commence gentiment à avoir l'impression de devoir pallier les carences de l'Etat au niveau social. Et je ne pense pas que cela soit normal dans un pays comme la Suisse", s'agace Benoît Sansonnens. "C'est souvent comme ça dans notre canton, on prend des petites mesures qui sont des emplâtres sur des jambes de bois. Tant qu'on n'aura pas de local à disposition, on ne pourra pas faire avancer ce projet."

Car pour l'instant la banque alimentaire n'a toujours pas de local. Mais les choses pourraient bouger dans les deux prochaines semaines. "Une option doit être soumise au Conseil d'Etat très prochainement", indique Jean-Claude Simonet. 

RadioFr. - Vincent Dousse
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